[CRITIQUE] Night Teeth – Les Dents de la Nuit

Nouvel arrivé sur le catalogue Netflix, Night Teeth raconte l’histoire d’un chauffeur devant transporter, a son insu, deux passagères aux dents acérées. Un voyage sanglant qui va donc lui faire découvrir un monde de la nuit, entre vampires et affrontements millénaires. Réalisé par Adam Randall et avec dans les rôles principaux Debby Ryan, Lucy Fry et Jorge Lendeborg Jr, la dernière nouveauté Netflix a pour objectif d’augmenter les films horrifiques du catalogue a l’approche d’Halloween. Vendu comme un mélange entre Collatéral et Dracula le pari est-il réussi ?

Tout d’abord le film se veut être une réinvention du mythe du vampire, en le mélangeant avec le Collatéral de Michael Mann. Et là il est déjà extrêmement intéressant tant le film de vampires est un de mes genres préférés pour une raison simple : il existe depuis le début du cinéma. De Nosferatu (1922) jusqu’à Twilight, en passant par les films de la Hammer, le genre du vampire est immortel. Tous les genres et courants cinématographiques y sont passés, en 1999 on comptait déjà plus de 650 films de vampires réalisés, et c’était sans compter le retour à la mode du mythe dans les années 2000.  Depuis le Nosferatu de Murneau en 1922 le genre a connu de nombreux films excellents dans bien des genres différents notamment avec la première femme-vampire dans Vampyr ou l’étrange aventure de David Gray de Carl Theodor Dreyer. Mais le genre va poser ses fondations les plus solides avec les prestations de Bela Lugosi et de Christopher Lee qui incarnent le comte Dracula dans Dracula en 1931 pour Lugosi puis Le Cauchemar de Dracula en 1958 pour Lee. Les deux films reprennent bien évidemment le personnage du comte Dracula, inventé par Bram Stoker pour son roman épistolaire Dracula en 1897. La romance avec Twilight (2008), le film adolescent épique avec Underworld (2003), la comédie avec What We Do In The Shadows (2014), le dessin animé avec Hotel Transylvanie (2012), le film historique avec Entretien avec un Vampire (1994) ou encore l’adaptation de comics avec Blade (1998) le genre du vampire s’est renouvelé sans cesse et d’ailleurs récemment c’est la troisième proposition de Netflix pour adapter le genre. En effet la compagnie américaine vient de sortir la sublime série Sermons de minuit, écrite et réalisé par Mike Flanagan qui réinvente superbement le mythe du vampire par le prisme de la religion. On a pu également voir le plus mitigé Blood Red Sky sur la plateforme. Ce troisième essai en peu de temps se rapproche-t-il donc plus de Sermons de minuit ou de Blood Red Sky en termes de qualité ?

Drôle de rouge a lèvres

Le postulat de base de Night Teeth est ultra-intéressant. Un chauffeur doit donc transporter deux vampires et va petit à petit se retrouver au sein d’une guerre de territoires entre clans de vampires. Toute cette introduction de mythologie est captivante, mais très vite l’exécution vient en partie gâcher le résultat. Les idées de départ qui semblaient intrigantes sont très vite abandonnés, on nous a introduit les différents vampires, les chasseurs, les protagonistes humains et puis plus rien. Au bout de son premier quart Night Teeth semble déjà s’essouffler et ses concepts originaux de vampires à Los Angeles se transforment en simples clichés de teen movie. Alors il n’y a aucun problème à faire des teens movies si on réinvente les codes du genre, mais ce n’est pas le cas ici. Adam Randall enchaine les clichés du film de vampires adolescents, clairement inspiré par Twilight pour toute la romance et un poil par Underworld sur le mélange entre mythologie et modernité. Le problème de ces clichés c’est qu’ils rendent le film prévisible. On pourrait alors penser que Night Teeth va se rattraper sur ses scènes d’action mais pas vraiment. La plupart sont très convenues et la violence est toujours dans le hors-champ ou très peu visible. Alors il n’y a pas de problème à faire des scènes d’action sans violence graphique, sauf qu’ici cela enlève totalement l’un des fondements du film de vampires : la peur. Dans Night Teeth les vampires ne font pas peur, néanmoins le film a tout de même compris une autre caractéristique des buveurs de sang : la métaphore sexuelle. Depuis toujours le vampire est une grande métaphore sexuelle au cinéma, son objectif ultime étant de « croquer » sa proie. Ici le film ne pousse pas énormément la métaphore mais il a tout de même au moins l’intelligence de ne pas faire de ses créatures des êtres difformes mais plutôt des individus baignant dans une ambiance totalement érotique.

Et il est le tout le charme du film : son ambiance. Aussi paradoxale que cela puisse paraître pour un film de vampires c’est la lumière qui vient sauver le tout. Un esthétique néon et fluo déborde de chaque scène et donne à l’ensemble une modernité factice. Mais c’est justement ça qui représente le mythe du vampire : il est à la fois toujours contemporain et à la fois toujours enchainé dans les codes du passé. Mais ils essayent sans cesse de montrer à quel point ils sont modernes, des néons étant placés dans quasiment chaque séquence. Alors bien évidemment que tout cela fait surement partie du cahier des charges pour un film pour adolescents mais on ne peut que remarquer que cela marche plutôt bien et donne à l’ensemble une modernité saisissante. La comparaison avec Les Prédateurs (1983) de Tony Scott ou Génération Perdue (1987) de Joel Schumacher pourrait sembler facile mais elle est pertinente. Les trois films partagent cette envie de placer le vampire dans un cadre moderne et très représentatif de leurs époques respectives. Alors est-ce qu’on peut en déduire que notre époque doit absolument être représentée par des néons et des bracelets fluos ? Non, mais il est indéniable que cette esthétique est à nouveau à la mode.

Blade Runner 2049

Pour conclure j’aimerais attirer votre attention sur Netflix et sur ce genre de films suivant une recette. Night Teeth est certes divertissant et son trio de protagonistes est plutôt bien interprété. L’ambiance lumineuse est intéressante et… C’est tout. Le reste du casting a simplement était choisi pour sa réputation (Megan Fox et Alfie Allen notamment) et ils sont mauvais dans leurs rôles respectifs. Le scénario ne suit qu’une trame convenue d’avance et définie par les obligations du film pour adolescents. Même chose du côté de la bande originale qui nous fait une Suicide Squad en enchainant les titres pop-rap-électro du moment sans aucune logique de rythme ou tout simplement de bons gouts. Netflix a promis de sortir un film par semaine et je n’ai aucun doute qu’ils y arriveront, mais si tous leurs films sont convenus d’avance, suivant simplement des codes, sans jamais de surprise alors je ne suis pas sûr de vouloir voir ça. Night Teeth n’est pas un mauvais film, il est simplement insipide, sans saveur ou audace particulière. C’est quoi le cinéma pour Night Teeth ? Selon le film c’est suivre une recette et développer un produit. Mais le cinéma ne s’arrêtera pas à ça, il est immortel, il traverse les âges en se renouvelant sans cesse. Le cinéma c’est un vampire, c’est LE vampire ultime. 

Note : 2 sur 5.

L’avis de la rédaction :

Louan N.

Bien qu’il ait recours à une caméra intéressante de temps à autre, le réalisateur Adam Randall ne parvient pas à créer un monde tangible et intéressant (visuellement ou autrement), malgré tout le temps d’exposition qu’il y consacre. Les scènes de combat sont tout aussi épouvantables – un film de vampires de série B devrait au moins pouvoir compter sur quelques bons meurtres, mais la plupart des séquences de combat de Night Teeth se déroulent hors champ ou sont si brèves et inintéressantes qu’elles en deviennent presque risibles. La nouvelle Mousline de Netflix est parsemée d’idées vampiriques (ré)jouissantes où l’érotisme émoustille, les néons sublimes, l’inconnu séduit. Or, comme toutes bonnes productions streaming qui se respectent, comme toutes purées industrielles, ce Night Teeth mord dans le commun et saigne un sang sans âme.

Note : 2 sur 5.

Night Teeth disponible sur Netflix le 20 décembre 2021.

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