Dans un monde où les forêts se consument et où les mers vomissent du plastique, les mythes ancestraux retrouvent une force que la modernité avait étouffée. Ce retour à l’état primal, où l’Homme se voit rappelé à l’ordre par les éléments, devient un cri sourd à l’intérieur de Mother Land. Le cadre de cette fable aux accents presque apocalyptiques ? Une famille déchirée par les tourments de la nature, mais plus encore par ses propres failles. Le long-métrage d’Alexandre Aja résonne avec des histoires telles que celles de The Witch de Robert Eggers ou Midsommar d’Ari Aster, où le sacré vient habiter le quotidien, provoquant le chaos. Mais ici, la mère (Halle Berry), figure centrale, incarne la matrice universelle, celle qui donne la vie et qui, fatiguée, menace de la reprendre.
La caméra s’attarde sur des visages épuisés, et chaque plan semble être une offrande à cette Terre oubliée. Ce qui aurait pu n’être qu’un énième récit de survie devient ici une réflexion sur la culpabilité transgénérationnelle. Les erreurs des pères se répercutent sur les enfants, et la nature n’en est que le témoin complice. La tension grimpe, mais ce n’est pas une explosion de violence qui la libère. C’est un silence. Un silence lourd, qui ressemble à une sentence prononcée par une entité bien plus grande que nous tous. On se rappelle alors Annihilation d’Alex Garland, où la nature se réinvente à chaque instant, indifférente aux drames humains, et où la beauté naît dans la destruction.
Et si l’ultime message de Mother Land n’était pas de savoir si nous pouvons cohabiter avec cette planète, mais de comprendre que nous ne la méritons peut-être plus ? Le dernier regard de la mère semble nous le dire, doucement, avant que la lumière ne s’éteigne. La terre n’a pas besoin de notre pardon. Mais c’est peut-être à nous de le quémander.
Mother Land d’Alexandre Aja, 1h42, avec Halle Berry, Percy Daggs, Anthony B. Jenkins – Au cinéma le 25 septembre 2024