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[CRITIQUE] Wendy – Peter Grand

Chacun de nous porte en soi une étincelle d’innocence enfantine, nourrissant ainsi une réticence à embrasser pleinement l’âge adulte, ce qui confère à un certain Peter Pan une stature quasi-idolâtre. Je présume que le nom de ce jeune garçon résonne familièrement à vos oreilles ; néanmoins, au cas où cet écho ne serait point encore parvenu à votre connaissance, permettez-moi de vous éclairer. Peter Pan demeure l’archétype de l’éternelle jeunesse, sillonnant les chemins de l’aventure et tissant des amitiés du matin jusqu’au soir, en un ballet perpétuel d’insouciance. Il possède également la faculté de s’élever dans les airs, ajoutant une dimension de merveilleux à son récit. Cependant, au-delà de ses escapades insulaires et de ses péripéties avec des personnages tels que Wendy, le Capitaine Crochet et les Enfants Perdus, l’histoire de Peter Pan résonne invariablement auprès de deux catégories de publics : les adultes déjà établis dans leur maturité et ceux aspirant à retrouver l’insouciance de l’enfance.

Au cours du siècle écoulé depuis l’éclosion de Peter Pan, cette mythologie a connu un foisonnement d’adaptations, de récits réimaginés et de métamorphoses narratives. Des œuvres animées aux productions télévisuelles, des volumes littéraires aux épopées cinématographiques en prises de vues réelles, des tableaux picturaux aux manèges palpitants, des univers vidéoludiques aux symphonies musicales, et bien d’autres encore, ont été conçus pour exalter l’essence intemporelle de ce conte. Élevée sous la tutelle de sa mère célibataire, Wendy se languit dans les méandres d’une existence dépourvue de féerie. Une nuit, poussée par l’appel de l’aventure, la jeune fille s’embarque avec ses deux frères, les jumeaux James et Douglas, à bord d’un train en marche. Après un périple échevelé, ils accostent sur une île mystérieuse, où le temps semble suspendu et où règne un jeune rebelle nommé Peter Pan.

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Ainsi, en cette année 2020, narrer l’épopée de Peter Pan sur pellicule en demeurant fidèle aux émotions originelles tout en insufflant une touche de nouveauté se révèle être un défi de taille. C’est ici que se présente Wendy, la dernière née de l’imaginaire de Benh Zeitlin, avec la volonté farouche de braver les pronostics pessimistes. À juste titre, il s’érige comme une adaptation de Peter Pan riche en éléments novateurs et en frissons captivants. Toutefois, cette audace narrative ne saurait dissimuler les imperfections du récit, qui oscille par moments entre l’équilibre précaire et l’immobilité stagnante. Les métaphores et allégories, si elles sont interprétées au pied de la lettre, semblent ajouter une dimension d’absurdité à un conte déjà féerique, tandis que leur dimension philosophique éloigne l’attention de l’histoire de Madame Darling pour la diriger vers des chemins moins attendus.

Malgré les réticences que certains pourraient éprouver à l’égard de Wendy, marquées par des chansons lancinantes et des références à la Terre-Mère sous un angle anthropomorphique, il est indéniable que ce film brille de mille feux. De ses plans minutieusement conçus à ses scènes d’une beauté renversante, l’ensemble exhale une aura envoûtante, portée par un attachement inébranlable. Les performances des jeunes acteurs, les décors sublimes, la partition musicale envoûtante (pour ne citer que quelques-uns des aspects), s’harmonisent à la perfection. Le long-métrage ne se conforme guère aux conventions cinématographiques établies ; elle transcende ces normes pour offrir une expérience sensorielle d’une rare intensité. Les défauts qui peuvent émailler le récit contribuent, à bien des égards, à son charme singulier. Car les plus grands films de tous les temps sont ceux qui, imparfaits, résonnent avec une humanité palpable. En ce sens, il se dresse comme une ode aux joies et aux tourments de l’existence humaine.

Ainsi, malgré ses aspérités, Wendy mérite amplement votre attention, car elle offre une vision inédite de l’univers de Peter Pan et de Neverland. Que vous soyez néophyte ou connaisseur de cet univers, jeune ou vieux, ce récit constitue une invitation à l’émerveillement, célébrant avec éclat la lutte intemporelle contre l’implacable écoulement du temps.

Wendy de Benh Zeitlin, 1h52, avec Devin France, Yashua Mack, Gage Naquin – Au cinéma le 23 juin 2021