[CRITIQUE] The Novice – Ça rame un peu

Remporter la victoire. Ce moment d’apothéose et de jubilation, l’incarnation de la joie et du soulagement, un état que l’ardente compétitrice Alex (Isabelle Fuhrman) peine à saisir dans The Novice. Pour elle, tout se résume à la victoire, à être la meilleure. La satisfaction et l’accomplissement ne pèsent guère.

Étudiante studieuse désintéressée par l’aviron, elle trace son chemin au sein de l’équipe universitaire, visant une place au sein du club prestigieux. Pour la plupart, cela signifierait l’obtention d’une bourse convoitée, mais son parcours académique lui rend cette nécessité superflue. Son unique aspiration : triompher dans un autre domaine. S’engageant dans un régime d’entraînement intensif à la rame, elle s’y consacre avec une obsession déterminée, prête à surmonter tous les obstacles, quel qu’en soit le coût. Une démarche mécanique, presque militaire, frôlant le masochisme. Pour son premier long métrage, la réalisatrice et scénariste Lauren Hadaway évolue en terrain familier : son court métrage inaugural était déjà consacré à l’aviron, tandis qu’elle officiait en tant que monteuse sur le film Whiplash de Damien Chazelle. The Novice s’apparente à un lointain cousin de l’adrénaline dépeinte par Chazelle : bien qu’il n’y ait pas de professeur sadique, Alex compense à elle seule par son obsession d’être la première à franchir la ligne.

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Le film dégouline de sueur (presque palpable), tandis que le sang s’écoule de ses mains, notamment d’une blessure marquante à la paume, refusant obstinément de cicatriser. Elle pleure de frustration et de mépris envers elle-même au moindre indice de seconde place. Tout au long du récit, le visage de Fuhrman irradie d’intensité et d’une concentration inébranlable, transformant l’intrigue en un thriller émotionnel. En dehors de l’impulsion obsessionnelle qui fait partie intégrante de son être, nous ne saisissons jamais véritablement ce qui la motive, tout comme les personnages à l’écran, et elle-même ne peut l’exprimer. Malgré la dramaturgie poignante des 90 minutes, le film se pare de peu de dialogues, privilégiant la physicalité et des images saisissantes et méticuleusement capturées pour narrer son récit. Les mots émanent principalement des entraîneurs d’aviron et, par intermittence, de conversations plus intimes. Le reste se fond dans l’arrière-plan, souvent étouffé, afin que l’attention se concentre sur le tumulte intérieur d’Alex. Les débuts de Hadaway en tant que réalisatrice dégagent une confiance manifeste, une sobriété maîtrisée, une légèreté pesante et une tension palpable.

Avec sa prise en main implacable, presque douloureuse, c’est un spectacle captivant, regorgeant de moments où l’on retient difficilement notre souffle face à l’imprévisibilité des actions d’Alex. C’est alors que l’on se trouve happé dans son univers compulsif.

The Novice de Lauren Hadaway, 1h37, avec Isabelle Fuhrman, Amy Forsyth, Dilone – Au cinéma le 11 janvier 2023

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