Allons bon, voilà que The Covenant de Guy Ritchie débarque sur Amazon Prime sans crier gare, comme un lapin sorti du chapeau ! Au milieu de toutes les attentes suscitées par Across the Spider-Verse, ce film discret nous rappelle à quel point Ritchie est un magicien du cinéma. On se demande pourquoi diable il n’a pas réalisé davantage de films de guerre ! Mais trêve de bavardages, plongeons dans ce tour de passe-passe cinématographique.
Lors de sa dernière mission en Afghanistan, le sergent John Kinley (interprété par le charismatique Jake Gyllenhaal) fait équipe avec l’interprète Ahmed (Dar Salim) pour se balader dans la région. Mais voilà qu’ils tombent dans une embuscade lors d’une patrouille, et nos deux compères se retrouvent les seuls survivants. Pendant que les combattants ennemis les pourchassent, Ahmed risque sa vie pour mettre Kinley, blessé, en sécurité. De retour aux États-Unis, Kinley découvre avec consternation que Ahmed et sa famille n’ont pas obtenu la possibilité d’entrer dans le pays comme promis. Déterminé à protéger son ami et à lui rendre la pareille, Kinley retourne sur la zone de guerre pour récupérer Ahmed et les siens…
RITCHIE AVEC PARCIMONIE
Il est étonnant de voir comment le même homme, responsable du naufrage qu’était Operation Fortune, peut nous présenter une telle pépite cinématographique. Guy Ritchie, l’amoureux des projecteurs, n’est pas du genre à se faire oublier. Le concept de « réalisateur fantôme » ne lui correspond pas, il préfère imprégner chaque œuvre de son style inimitable. Ici, pas de Jason Statham, son acolyte favori, mais Jake Gyllenhaal dans un film de guerre sans temps mort pour les pitreries. Exit l’humour, l’ambiance est sombre, avec des notes documentaires qui se mêlent à une réalisation plus mesurée, plus réfléchie dans le développement des personnages. Un véritable paradoxe, n’est-ce pas ?
En vérité, on dirait que Ritchie hésite entre son penchant pour l’action frénétique et une approche plus sérieuse des personnages. The Covenant tente d’explorer des profondeurs, mais parfois on a l’impression que cela sonne creux, comme si l’on buvait dans un verre vide au pub. Le film navigue entre les eaux, indécis, cherchant son propre rythme. Si l’on ne connaissait pas son pedigree, on pourrait croire que ce n’est pas une œuvre du réalisateur anglais, à quelques clins d’œil près pour flatter son ego. Aurait-il pris une pause dans sa consommation de cocaïne ? Cela expliquerait peut-être cette évolution vers un ton plus sérieux…
DU FILM DE GUERRE, ET PLUS ENCORE
The Covenant va bien au-delà de l’étiquette de simple film de guerre. C’est comme si Guy Ritchie avait décidé de nous offrir un spectacle en trois actes. Au-delà du genre principal, on trouve une dose de survival, une pincée de film de sauvetage et une bonne dose de thriller politique. C’est un cocktail détonant, avec un zeste de trahison, de lâcheté et de revanche, le tout servi sur un plateau de maturité. Ritchie s’interroge sur les motivations des uns et des autres, sur la complexité de la situation en Afghanistan et sur les enjeux militaires globaux. La guerre est le cadre, mais le réalisateur creuse plus profondément, dévoilant les liens humains, les dilemmes moraux et les conséquences désastreuses de l’engagement américain.
L’atmosphère est étouffante, les enjeux sont élevés, et tout cela s’imbrique parfaitement dans le contexte militaire global. On pourrait reprocher au scénario un début un peu lent, où les enjeux mettent du temps à se mettre en place. Mais une fois que nos héros sont pris au piège, on est accroché et on ne lâche plus. La tension est omniprésente, et Ritchie aborde en filigrane un sujet peu connu du grand public : ces interprètes locaux qui ont aidé les soldats américains pendant le conflit afghan, en attente d’un visa promis en échange de leur aide. Un contexte pertinent et instructif qui met en lumière les dérives belliqueuses des USA.
Et que dire de la superbe bande-son de Christopher Benstead qui accompagne le film ? Avec ses cordes puissantes, elle nous rappelle vaguement la géniale musique de Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur, une autre folie du réalisateur. Elle s’accorde parfaitement au film, amplifiant l’intensité des enjeux. Et que dire du final, à la fois brutal et impressionnant, qui répond parfaitement à l’assaut initial ? Il clôt un bon film de guerre qui se démarque des autres par son dynamisme, ses détours narratifs, ses dilemmes moraux et son fond engagé.
LA CHALEUR DU RÉEL
Chaque acteur, du brillant Jake Gyllenhaal aux figurants, sont à fond dans leurs rôles, et ça se ressent. Ils parviennent à attirer notre attention et à nous faire ressentir toutes les émotions voulues, au moment voulu. C’est rafraîchissant de se laisser emporter par un film qui mise sur de vrais acteurs, plutôt que de se faire éblouir par des effets spéciaux en CGI ou des discours pompeux. Et parlant de CGI, il est utilisé avec parcimonie et talent, uniquement pour renforcer les effets pratiques. C’est peut-être là le meilleur atout de ce film : tous les éléments sont harmonieusement tissés, de l’introduction au générique de fin, pour que le public vive une expérience viscérale et se délecte de chaque instant, comme un bon vieux fish and chips.
Notre cher Guy Ritchie nous aurait-il fait un virage artistique, ou aurait-il simplement mis de côté sa consommation de cocaïne ? Quoi qu’il en soit, The Covenant représente un tournant dans sa carrière. Il nous offre un film de guerre réaliste, intense et captivant, dans lequel il explore différents
The Covenant de Guy Ritchie, 2h03, avec Jake Gyllenhaal, Dar Salim, Alexander Ludwig – Sur Prime Vidéo le 23 juin 2023.