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[CRITIQUE] The Guilty (2021) – Gyllenhaal sauveur d’un kidnapping

Les remakes, spécialement ceux des films étrangers récemment acclamés, constituent toujours un défi délicat. Comment transcender l’original, s’il en existe un, et apporter quelque chose qui échappe à la simple répétition pour offrir plutôt une réinterprétation de l’histoire avec un regard neuf, rendant ainsi le remake digne d’intérêt ? The Guilty d’Antoine Fuqua, survenant trois ans seulement après que Gustav Möller ait captivé le public et la critique avec son œuvre initiale, sélectionnée par la suite pour l’Oscar du meilleur film international pour le Danemark, se trouve confronté à ce défi. Réussir une adaptation américaine semble quasiment insurmontable, car le suspense repose sur le principe unique et captivant de maintenir les caméras focalisées sur le répartiteur en détresse pendant la quasi-totalité des 90 minutes du film. Bien que ne se limitant pas à une simple reproduction, le film conserve l’essence de l’histoire originale tout en étoffant le parcours du protagoniste, offrant des résultats mitigés.

Ce qui distinguait le film original, c’était son focalisation sur une intrigue unique, palpitante, capturée dans un lieu unique avec une utilisation magistrale du son, du mixage et du montage, ainsi qu’une performance principale remarquable offrant une véritable montée d’adrénaline sans que le spectateur n’aperçoive autre chose à l’écran qu’un agent du service d’urgence. Le remake semble davantage préoccupé par la mise en place de deux intrigues parallèles : le récit de l’agent de police Joe (interprété avec brio par Jake Gyllenhaal) du centre d’appels 911 et celui de l’affaire qu’il tente désespérément de résoudre. C’est à la fois une force et une faiblesse pour le film : d’un côté, cela met en valeur les talents d’acteur de Gyllenhaal, le présentant dans sa vulnérabilité la plus profonde, en tant qu’homme aux prises avec son passé tout en se lançant dans une course contre la montre pour sauver une vie. Gyllenhaal offre une prestation remarquable, captant parfaitement la douleur de Joe qui lutte pour maîtriser ses propres démons et qui s’investit peut-être trop dans la sécurité d’Emily, la femme en détresse qui appelle au secours.

D’un autre côté, en consacrant une grande partie du film à la lutte personnelle de Joe, l’œuvre s’éloigne de ce qui rendait l’original si efficace : elle perd de vue son intrigue principale, créant ainsi une dissonance pour le spectateur. Aussi crédible et bien interprétée soit la performance de Gyllenhaal, le film atteint son apogée lorsqu’il se concentre sur l’angoisse d’Emily, même si nous sommes rarement arrachés au lieu principal du centre d’appels (une stratégie souvent cruelle de la part de Fuqua). En tentant d’être à la fois une étude de personnage et un thriller palpitant, le film perd par moments son équilibre, mais reste globalement une expérience assez captivante. Cependant, alors que l’original reléguait l’histoire du protagoniste au second plan pour maintenir l’attention du public, le remake semble privilégier son personnage principal au détriment de la tension narrative.

Moins focalisé que l’original mais néanmoins un thriller solide et efficace, The Guilty raconte l’histoire de deux individus en proie à des tourments, offrant des parallèles à établir entre eux. Avec une performance centrale robuste et un récit bien cadencé, il s’agit d’un thriller accessible qui saura certainement séduire un large public, même s’il n’atteint pas de nouveaux sommets ni n’apporte de nouveautés à ce genre cinématographique.

The Guilty d’Antoine Fuqua, 1h30, avec Jake Gyllenhaal, Riley Keough, Peter Sarsgaard – Disponible sur Netflix