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[RETOUR SUR..] Harry Potter à l’école des sorciers – Le prisme de la nostalgie

Noël 2001. Adapté du roman à succès de J. K. Rowling, Harry Potter à l’école des sorciers sort dans les salles du monde entier. Le succès est instantané : plus d’un milliard de dollars de bénéfice, des nominations aux oscars et un total de sept suites mises en chantier. En 2001, ce premier opus des aventures du jeune sorcier est le film le plus rentable de l’année. Des centaines de produits dérivés vont être vendues et il va fidéliser instantanément toute une communauté de fans qui vont suivre chaque nouvelle sortie pendant dix ans. Alors qu’approche les vingt ans du film de Chris Columbus, revenons ensemble sur Harry Potter à l’école des sorciers et demandons-nous ce que ça vaut vraiment, aujourd’hui, avec du recul.

Revenons en 1999, Warner Bros vient d’acheter les droits d’adaptation d’Harry Potter pour la modique somme d’un million de livres sterling. Les regards se tournent alors vers Steven Spielberg qui accepte le poste de réalisateur à la condition que le rôle d’Harry Potter soit confié à Haley Joel Osment. Le jeune Américain a déjà incarné le fils de Forrest Gump en 1994 et le célèbre enfant du film Sixième Sens en 1999. Mais J. K. Rowling s’oppose à ce choix car elle souhaite une distribution britannique, Spielberg quitte donc le projet et part réaliser avec Osment son A. I. Intelligence Artificielle. En attendant de trouver un nouveau réalisateur, David Heyman, producteur du projet, s’occupe très rapidement de faire signer John Williams à la musique et Steven Kloves au scénario pour au moins trois films. Pendant ce temps de nombreux réalisateurs postulent : Night Shyamalan, Robert Zemeckis, Peter Weir, Alan Parker, Terry Gilliam et Chris Columbus. C’est finalement ce dernier qui obtient le poste tant convoité.

Haley Joel Osment AKA Mark Zuckerberg

Pour le casting des acteurs c’est assez rapidement Daniel Radcliffe, Emma Watson et Rupert Grint, tous Britanniques, qui sont choisis pour incarner les personnages principaux. Quelques changements sont effectués en 2000 comme notamment pour le personnage de Severus Rogue qui devait être interprété par Tim Roth mais c’est finalement Alan Rickman qui obtient le rôle. Même chose pour le personnage d’Hagrid qui devait être joué par Robin Williams avant que ce ne soit Robbie Coltrane. En septembre 2000 le casting est bouclé et le tournage peut commencer, en grande partie aux studios Leavesden. Le film termine son tournage le 23 mars 2001 et part en post-production pour une sortie en Novembre et Décembre 2001, soit pour les fêtes de Noël.

L’objectif du studio est donc de faire une comédie familiale pour fidéliser un public important à Noël et ainsi assurer l’avenir de la saga. Et aujourd’hui, avec vingt ans de recul, on peut considérer que ce choix est à la fois une des forces et des faiblesses du film. En matière de comédie familiale, avec une pointe d’action, le film réussit son pari d’imposer un univers original avec beaucoup d’humour. Le comique de situation et de caractère marche beaucoup pour cet univers fantastique et magique, l’humour ne tombe jamais dans le burlesque. On a affaire à une œuvre qui sait être drôle sans être ridicule, ce qui est une grande force. Néanmoins, cette grande part du comique dans le film remplace beaucoup le côté dramatique de ce premier volet et lui donne un air un peu niais aujourd’hui. Surtout en comparaison avec les films suivants. Harry Potter à l’école des sorciers est donc un film cocon qui, par sa niaiserie, reste très représentatif de l’image que l’on se fait de l’enfance.

Bon il a pas l’air très malin ici mais c’est bien lui l’élu

Ce premier film a donc la lourde tâche d’installer entièrement un univers riche et complet. En se concentrant sur cette introduction d’univers assez lourds (Poudlard, l’histoire d’Harry, les sports magiques, un grand nombre de personnages, de créatures et de lieux magiques), Chris Columbus oublie de se concentrer sur sa réalisation. Assez fade et formel, elle oublie d’avoir une direction artistique et ne cherche qu’à filmer le récit sans jamais ajouter un point de vue ou une opinion. Mais cette pauvreté artistique est d’une certaine manière excusable car on parle d’un film qui doit expliquer clairement un grand nombre d’informations. On aime ce premier volet parce qu’il nous fait rêver et qu’il installe tout un univers fantastique, mais du point de vue de la mise en scène c’est très léger. Et ce ne sont pas les effets spéciaux qui viennent améliorer le tout : rarement quelque chose aura autant mal vieilli. Le troll des toilettes sortant tout droit d’une animation du Futuroscope ou le visage de Voldemort dans l’acte final ayant un très bon rendu (pour une cinématique de Playstation 2).

Que quelqu’un l’achève s’il vous plait

On a donc insisté sur le fait que ce premier film se concentrait beaucoup plus sur la découverte et l’installation de cet univers plutôt que sur la mise en scène. Cette installation est par contre très réussie et l’univers fantastique de J. K. Rowling devient instantanément tangible et crédible. Plusieurs éléments viennent justement aider le spectateur à entrer dans l’univers. Tout d’abord, les décors de Stuart Craig sont pour la plupart réellement construits, ce qui aide à s’immerger dans Poudlard ; la photographie de John Seale a également plusieurs bonnes idées, notamment dans la Forêt interdite et dans le jeu d’échecs final. Chris Columbus réalise un travail très faible mais l’ensemble de son équipe permet au film d’installer un univers cohérent et réussi, des décors à la photographie en passant par les somptueux costumes de Judianna Makovsky, nommée aux oscars pour son travail sur ce premier volet. Une autre personne ayant travaillé sur le film voit son travail nominé aux oscars, le célèbre John Williams, un des plus grands compositeurs de musique de cinéma encore en activité. La saga Harry Potter s’offre donc le compositeur de Star Wars, Jurassic Park et d’Indiana Jones pour composer toute sa bande originale. Et c’est une des raisons principales du statut iconique des films, pour beaucoup de spectateurs ayant grandi avec les films, entendre quelques notes du thème principal c’est retourner immédiatement à Poudlard.

Alors au final Harry Potter à l’école des sorciers ça vaut quoi après 20 ans ? Le film a très clairement pris un bon coup de vieux. La plupart des acteurs enfants jouent mal (exception faite de Rupert Grint) tandis que du côté des adultes c’est déjà mieux mais sans aucune prestation transcendante. Les effets spéciaux et la mise en scène très faiblarde ne viennent pas arranger les choses. Columbus se contentE de champ\contrechamp ou de plan moyen tout à fait académique. Mais alors qu’est ce qui fait qu’on aime autant ce film ? La nostalgie y joue pour beaucoup bien sûr mais il ne faut pas oublier tout le travail d’une équipe technique talentueuse et passionnée. Que ce soit les costumes, les décors, la musique ou la photographie, vingt ans plus tard on n’oublie toujours pas Poudlard. Le rôle d’Harry Potter à l’école des sorciers n’a jamais été facile, le studio souhaitant surtout créer une base pour sept suites. Et de ce point de vue-là, le film est une réussite totale. Un résultat mitigé du point de vue artistique mais que l’on peut “excuser” quand on connaît le réel objectif de cette première adaptation. Et surtout avec notre recul on se permet de l’excuser car on sait que grâce à ce premier volet on aura d’excellents films (notamment celui de Cuarón). Alors oui ça vaut le coup de se taper deux volets mitigés de Columbus avant. Et donc, après avoir revu Harry Potter à l’école des sorciers, c’est quoi le cinéma ? Le cinéma c’est un très beau conte merveilleux vu à travers le prisme de l’enfance. Une fable qui a mal vieilli, mais ses rides sentent toujours bon la nostalgie et la musique de John Williams, alors on l’aime toujours cette bonne vieille histoire de l’enfance. 

Harry Potter à l’école des sorciers disponible en (S)VOD, DVD et Blu-ray.