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[CRITIQUE] Comment je suis devenu super-héros – Oui, oui, Baguette

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Par Louan Nivesse

Depuis un certain nombre d’années, le genre des super-héros s’est érigé en figure de proue de l’industrie cinématographique hollywoodienne. Dès le triomphe, tant populaire que critique, de Iron Man réalisé par Jon Favreau, qui marqua l’avènement de l’univers cinématographique Marvel, ce domaine est devenu une véritable manne, une source d’inspiration sans fin. Avec les emblématiques Marvel Studios, DC Comics et autres studios, une pléthore de films de ce genre, émanant exclusivement des États-Unis, ont envahi nos salles obscures. Désireux de s’approprier cette tendance, en raison de sa popularité grandissante et de son attrait commercial, les studios de production français ont entrepris de créer plusieurs œuvres mettant en scène des super-héros. Parmi elles, le récent Angle Mort, dirigé par les prometteurs Patrick-Mario Bernard et Pierre Trividic, se distingue, bien que handicapé par des contraintes budgétaires apparentes, par une cadence trop languissante et une retenue excessive. Cet exemple illustre la teneur générale des productions françaises dans ce registre, méconnues d’une vaste partie du public en raison de leur distribution limitée, et présentant diverses lacunes, que ce soit au niveau de la mise en scène ou du scénario. Ainsi, l’annonce d’un projet ambitieux baptisé Comment je suis devenu super-héros, soutenu par Warner Bros France et porté par Douglas Attal, féru de bandes dessinées, suscitait à la fois appréhension et engouement.

Dans le Paris contemporain de 2020, les individus dotés de pouvoirs surhumains sont désormais pleinement intégrés à la société. Le lieutenant Moreau se voit confier la mission d’enquêter sur des incidents attribuables à une substance mystérieuse conférant des capacités surhumaines à ceux qui en sont dépourvus. Il est épaulé par Cécile Schaltzmann, récemment affectée à l’unité après son service à la brigade financière. Tous deux bénéficieront de l’aide de Monté Carlo et de Callista, deux anciens justiciers, dans leur lutte contre le trafic de cette substance. Cependant, l’enquête se complique lorsque le passé de Moreau refait surface, semant le trouble.

Dès les premières images jusqu’à la conclusion, l’empreinte du budget (environ 15 millions d’euros) se fait ressentir dans tous les aspects de la direction artistique. Des effets spéciaux aux costumes, chaque choix est judicieux, résonnant parfaitement avec les attentes d’un public habitué à l’esthétique des grandes productions hollywoodiennes. Malgré une certaine propension à la trivialité, ces effets s’intègrent harmonieusement à des décors à la fois classiques et familiers, contribuant à l’immersion dans le Paris contemporain. L’expérience de voir des super-héros s’affronter dans les rues de notre capitale, aussi belle que tumultueuse, procure une satisfaction indicible. Cependant, là où le film pèche, c’est dans sa mise en scène des scènes d’action. Celles-ci sont trop fragmentées, souvent incompréhensibles en raison d’un recours regrettable à la caméra instable (le syndrome des frères Russo). Bien que peu fréquentes, ces séquences détonnent par leur maladresse, contrastant avec le reste de la mise en scène. Malgré ce défaut, l’engagement de toute l’équipe envers ce projet transparaît. Douglas Attal déploie une énergie inébranlable derrière la caméra, guidant un ensemble d’acteurs investis dans leurs rôles.

Copyright Shanna Besson / Warner Bros. France

Pour un projet d’une telle envergure, destiné à ouvrir la voie à d’autres films du même acabit, un casting capable de séduire un large public est essentiel. Porté par un Pio Marmaï charismatique, parfaitement incarnant le rôle du super-flic désinvolte, le film bénéficie d’un casting judicieux. Vimala Pons forme avec Pio Marmaï un duo ami/ennemi touchant et authentique, dépeignant une évolution émouvante à mesure qu’elle surmonte le mépris condescendant de Moreau. Dans des rôles secondaires, Swann Arlaud jongle habilement entre surjeu et sous-jeu pour interpréter un antagoniste en apparence complexe mais finement travaillé. Quant à Benoit Poelvoorde, initialement présenté comme le compagnon comique du héros, il campe en réalité un personnage profondément tourmenté, d’une sensibilité bouleversante. Sa prestance rehausse l’attrait du film, soutenue par une écriture remarquable et une interprétation magistrale. Sa présence éclipse même la majorité du casting, reléguant des acteurs talentueux tels que Leila Bekhti à des rôles secondaires, bien que leur performance demeure impeccable.

L’histoire n’innove pas véritablement. Le récit d’un homme découvrant ses super-pouvoirs tout en enquêtant sur un super-vilain aspirant à la domination mondiale constitue un schéma narratif récurrent dans ce genre de productions. Néanmoins, Douglas Attal ne cherche pas à révolutionner le genre. À travers ce film, il rend un hommage subtil et plaisant à la culture super-héroïque qui a marqué son enfance et son adolescence. Il parsème son œuvre de références à des franchises telles que X-Men, Watchmen et Avengers, sans les énoncer explicitement, préférant les suggérer de manière discrète et élégante.

Assumant pleinement ses ambitions et ses sources d’inspiration, Douglas Attal offre un divertissement savoureux et exaltant, empreint des thèmes et de l’esthétique de la récente série The Boys, tout en conservant le charme distinctif du cinéma français. Comment je suis devenu super-héros possède le potentiel nécessaire pour redéfinir nos habitudes cinématographiques nationales. Il s’agit d’une recommandation chaleureuse, d’un film d’une importance singulière, appelé à devenir un incontournable de notre patrimoine culturel cinématographique.

Comment je suis devenu super-héros de Douglas Attal, 1h37, avec Pio Marmaï, Leïla Bekhti, Vimala Pons – Exclusivement sur Netflix.

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