Teddy Devisme est un critique spécialisé dans le cinéma britannique. C’est donc tout naturellement que pour son premier ouvrage il s’est tourné vers l’outre-manche pour mettre en lumière les nouveaux cinéastes du cinéma britanniques. « Nouvelles voix du cinéma social britannique 2009-2021 », est donc un ouvrage qui se propose d’analyser l’émergence de ces artistes, qui restent à l’international dans l’ombre de Ken Loach et de son cinéma militant. Le livre commence donc par introduire les mécaniques de ce réalisateur, et donc la manière dont le cinéma britannique fonctionnait, avant d’ensuite explorer les changements artistiques qui ont actuellement lieu. Une méthode pédagogue qui permet d’avoir constamment un point de comparaison dans le temps et donc de mettre en évidence des évolutions de méthodes, donc de mentalités. On saluera également la pertinence des exemples apportés, que ce soit dans le choix des œuvres mais aussi des interviews qui concluent le livre. Des entretiens qui permettent alors de préciser certains points du livre, tout en humanisant le tout. Enfin, tout un chapitre est consacré aux paysages, l’une des thématiques préférées de l’auteur et vous le savez : je le rejoins parfaitement sur l’importance des décors au cinéma. Nous remercions donc Teddy Devisme pour ce livre de référence sur le cinéma britannique contemporain, mais également pour avoir accepter de répondre à nos questions.
Enzo Durand : Tout d’abord merci Teddy pour ce « Nouvelles voix du cinéma social britannique 2009-2021 » et j’aimerais donc revenir avec toi sur l’origine de ce titre.
Teddy Devisme : Alors j’aime beaucoup cette anecdote ! La BBC avait mis en ligne une vidéo teaser, fin 2021, pour annoncer l’arrivée de plusieurs films sur leur chaîne. Et donc ils avaient appelé tout cela « New Voices of British Cinema » donc je leur ai « emprunté » ce titre que j’aime bien.
ED : Et l’idée du livre en lui-même ça t’es venu quand ?
TD : Alors à l’origine c’était un article que j’ai écrit, de seulement 45 000 caractères, que je souhaitais proposer. Finalement je n’ai eu personne qui souhaitait le prendre, ou alors parfois même pas de réponses, donc je me suis dis que j’allais continuer à le développer. De fil en aiguille l’article s’épaissit et commence à ressembler à un livre. À la base pourtant je souhaitais écrire un premier bouquin sur un autre sujet, plus pointu que celui-là pourtant. Mais je me suis ravisé et j’ai donc fais ce sujet sur le cinéma britannique mon premier livre. Surtout que c’est une bonne porte d’entrée, avec des films récents notamment.
ED : C’était quel sujet le premier livre ?
TD : (rires) Je ne peux pas encore le dire ! Mais c’est en cours d’écriture.
ED : Alors toujours sur ce titre, pourquoi avoir choisi ces bornes chronologiques, et notamment 2009 avec la sortie de Fish Tank par Andrea Arnold ?
TD : Je considère ce film comme une base pour toutes les évolutions suivantes. C’est une inspiration pour beaucoup de films ensuite, et pour tout le cinéma social britannique. Notamment sur la manière d’écrire, sur la représentation de ces personnages, ou sur leur environnement. Avec Fish Tank il y a un changement optimiste dans la manière d’aborder ces sujets. Alors qu’auparavant le cinéma social britannique c’était surtout Ken Loach, donc pas les films les plus optimistes.
ED : D’ailleurs le premier de tes chapitres est intitulé « Le cinéma de Ken Loach », et tu suis une forme de cliché qui est de toujours commencer par Loach.
TD : Alors oui mais c’est justement pour dénoncer cette forme de marketing qui consiste à toujours ramener Ken Loach quand on a du cinéma social britannique avec des formules comme « Un Ken Loach au féminin » ou « Le nouveau Ken Loach » ce qui est presque insultant ! Tout cela est très réducteur donc je me suis dis que oui j’allais partir du cinéma de Ken Loach, pour le définir, et donc ensuite montrer comment les nouvelles voix du cinéma britannique se différencient de Loach.
ED : Et justement, comment ces nouveaux cinéastes se différencient ?
TD : Alors de beaucoup de manières justement ! Pour moi Ken Loach c’est un cinéma très terre-à-terre, un cinéma de constat contrairement à ces nouvelles voix. Pour reprendre l’exemple de Fish Tank, c’est un film où il y a beaucoup d’espoirs et de rêves ! Et c’est notamment grâce à l’importance de la danse, on est sur des idées très différentes de Ken Loach. Les personnages pivots sont là chez Ken Loach pour montrer l’environnement autour, tandis que chez Andrea Arnold on se recentre sur l’intime. Il y bien des différences mais pour cela il faut lire le livre bien sûr !
ED : Pour toi ces changements cinématographiques, bien plus optimistes, reflètent-t-ils l’état d’esprit de la société britannique ?
TD : Je pense qu’au contraire entre le Brexit et les nombreuses lois polémiques, les spectateurs ont besoin de rêves et de se recentrer sur les personnages, sur l’intime. Ces rêves permettent de montrer de la solidarité et donc de l’espoir, car justement on se sent délaissé par la politique !
ED : Merci d’avoir pris du temps pour nous répondre, et à bientôt pour ce prochain livre alors !
« Nouvelles voix du cinéma social britannique 2009-2021 » de Teddy Devisme, paru le 16 juin 2022, est disponible aux Éditions du Net.
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