Rechercher

[CRITIQUE] Sundown – Franco est fidèle à ses habitudes

Sorte de bad boy autoproclamé du cinéma des festivals internationaux (on le voit sur le tapis rouge en blouson de moto en cuir), le cinéaste mexicain Michel Franco a bénéficié des faveurs des programmateurs du monde entier, ses œuvres étant presque toujours présentes à Cannes ou à Venise. Comparé à Michael Haneke dès le début de sa carrière, Franco se spécialise dans les contes moraux mesquins qui traitent de la capacité humaine à la violence et à la cruauté d’une manière généralement directe. Son deuxième long métrage, Después de Lucía, lui a valu le premier prix d’Un certain regard à Cannes en 2012, ce qui a été le dernier moment où son travail a été chaleureusement accueilli par la critique.

Les films qui ont suivi sont régulièrement mis en pièces par les cinéphiles qui s’y aventurent (Chronic, en 2015, est peut-être le plus célèbre à cet égard). Il semble que ce soit le genre d’attention que Franco courtise, ses films associant un sujet sombre à une subversion narrative espiègle destinée à dérouter et à décevoir, chacun semblant conçu comme un acte d’agression contre le public dans le même esprit que les deux Funny Games d’Haneke. N’ayant aucun désir de ralentir ou de tourner la page, Franco est revenu à la Mostra de Venise avec son dernier film Sundown, un an exactement après y avoir présenté Nouvel Ordre.

© Ascot Elite Entertainment

Un film Buñuelien plutôt grossier critiquant la passivité et la complicité de la bourgeoisie mexicaine face à une armée sauvage, Nouvel Ordre a reçu la mauvaise réaction que l’on attend de son travail, mais s’est également avéré être l’un de ses plus grands succès aux États-Unis. Ce film était aussi légitimement l’un de ses plus forts depuis un certain temps, succinct et direct dans sa provocation, frustrant, mais pointu : quelque chose qui ne peut vraiment pas être dit pour ce dernier film.

Réunissant le réalisateur et la star de Chronic, Tim Roth (qui était par hasard président du jury d’Un certain regard l’année où Franco a gagné), Sundown lui donne le rôle de Neil, un riche célibataire européen maussade en vacances au Mexique avec sa sœur (Charlotte Gainsbourg) et ses deux enfants. Les vacances de Roth et Gainsbourg sont interrompues par la nouvelle que leur mère est décédée, les laissant en héritage d’une immense fortune et d’un empire commercial, une révélation qui incite Neil à abandonner sa famille et à rester au Mexique pour se saouler et rencontrer les habitants. L’intrigue principale de Sundown est d’analyser les motivations de Neil, qui semblent bénignes mais restent vagues. Le conflit du film émerge finalement lorsque Gainsbourg retourne au Mexique pour le confronter. À partir de là, Franco se livre à ses ruses habituelles, sapant les attentes du public en introduisant des rebondissements inattendus qui résistent à toute forme de poétisation.

© Ascot Elite Entertainment

Il s’agit d’un exercice scénaristique curieux à bien des égards, le plus généreux étant une tentative de se rapprocher des cruautés apparemment chaotiques de la vie, mais si le mépris de Franco pour les conventions procure quelques frissons avoués, Sundown ne parvient pas à faire plus que cela.

Note : 3 sur 5.

Sundown disponible à l’achat et à la location sur viva.videofutur.fr

Au cinéma le 27 juillet 2022