[CRITIQUE] Moonfall – Transformers dans l’espace

Lorsqu’il est question de films catastrophe, le nom de Roland Emmerich émerge invariablement, porté par une réputation bien méritée. Ce réalisateur a forgé une œuvre emblématique et novatrice dans le genre, de Independence Day à Le Jour d’après, chacun de ses films repoussant un peu plus loin les frontières de l’imaginaire. Toutefois, Moonfall illustre de manière éloquente la possibilité d’aller trop loin dans cette quête de l’extrême, en s’embourbant dans une narration si labyrinthique qu’elle oublie d’être captivante ou divertissante. Certes, le film déborde de séquences d’action grandioses et d’exploits visuels époustouflants, mais même ces éléments manquent d’une énergie vitale, relégués au second plan par une exposition fastidieuse et redondante.

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Moonfall dessine un monde où notre satellite, la Lune, est propulsé hors de son orbite pour entrer en collision avec la Terre, déclenchant une cascade d’événements tectoniques et de catastrophes naturelles. Pour conjurer ce désastre et préserver toute forme de vie sur notre planète, la célèbre astronaute Jocinda Fowler, incarnée par Halle Berry, s’associe à son partenaire Brian, incarné par Patrick Wilson, autrefois disgracié publiquement, ainsi qu’au théoricien local des complots, K.C., joué par John Bradley. Leur périple vers la Lune les confronte à des vérités bouleversantes sur notre monde. Malgré le potentiel intrigant et exaltant de ce concept pour un blockbuster, le film délaisse son essence de catastrophe épique pour se muer en un drame familial de science-fiction sous-développé. Les spectateurs ne recherchent pas des intrigues secondaires fades et vacillantes sur les tourments conjugaux et les batailles pour la garde des enfants ; ils espèrent être plongés dans le chaos et l’effroi que promet le scénario apocalyptique du film. Pourtant, le film utilise sa catastrophe centrale comme un simple décor, négligeant avec désinvolture les personnages et leurs relations insipides.

Il est indéniable que les personnages manquent de profondeur et de charisme. La plupart demeurent unidimensionnels, définis principalement par leurs compétences et leurs interactions plutôt que par leur personnalité propre. L’exception notable est Brian dont le parcours vers la rédemption et l’acceptation de soi résonne authentiquement, offrant des instants de véritable émotion au milieu de l’absurdité de l’intrigue principale. En revanche, le personnage de K.C., se révèle frustrant et superflu, relégué au rôle d’expert local qui explicite inutilement l’intrigue à chaque tournant, sapant ainsi la tension du film et sous-estimant l’intelligence du public. Même pour un spectacle d’action dénué d’intérêt, des dialogues captivants et une progression narrative stimulante sont nécessaires pour retenir l’attention du spectateur, des aspects où Emmerich échoue lamentablement. Il souffre de répliques discutables et artificielles, entravant le développement des personnages et limitant notre empathie envers eux.

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Si l’on a vu la bande-annonce avant de visionner le long-métrage, on pourrait penser à une comédie, mais tel n’est pas le cas. Les personnages s’expriment essentiellement par des railleries incessantes, mais le ton général du récit ne s’aligne pas sur cette légèreté, ce qui rend les personnages décalés dans cet univers. Le film peine à choisir un ton, jonglant entre les blagues incessantes et une réflexion sérieuse sur la science et la politique contemporaines. En optant pour l’une de ces approches de manière cohérente, le film aurait pu atteindre son objectif, que ce soit en tant que comédie consciente ou en tant que drame intense et palpitant. En négligeant cette décision, le film laisse ses multiples tons se télescoper sans jamais s’harmoniser, privant ainsi le récit d’une unité narrative convaincante.

Certes, les attentes n’étaient peut-être pas extravagantes, mais le film s’avère tout de même une déception notable. C’est regrettable, car sous les couches de personnages fades et d’expositions fastidieuses, réside le potentiel d’un grand film. En réalité, Moonfall contient plusieurs films en un : un thriller catastrophe captivant, un drame familial poignant et même une satire perspicace sur l’état de la science moderne. Cependant, en tentant de tout embrasser, le film échoue à développer chacun de ces aspects de manière satisfaisante. C’est un revers cuisant pour Emmerich, mais il témoigne du potentiel persistant du réalisateur à livrer de grands films catastrophes, pour peu qu’il mette de côté ses ambitions démesurées pour se concentrer sur l’action spectaculaire qui a fait le succès de ses premiers films.

Moonfall de Roland Emmerich, 2h00, avec Halle Berry, Patrick Wilson, John Bradley – Au cinéma le 9 février 2022

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Un commentaire

  1. Babylon Reply

    Je vous trouve bien généreux sur la notation, la critique en revanche est très juste. Le film ne parvient même pas à être un nanard agréable tans les intrigues sont ennuyantes au possible… Mention spéciale au beau père, vendeur de voiture insupportable, au fils rebel qui a le charisme d’une moule et à l’ex mari de Hale Berry, militaire demeuré. Le film est une succession de clichés, qui prend bien son temps pour placer des produits (bonjour Lexus) et pour caresser le public chinois dans le sens du poil, mais bon sang pourquoi entrecouper des passages hallucinants de bêtise a l’intérieur d’une l’une creuse fabriquée par des aliens, avec l’histoire des crétins restes sur terres ? Que viennent faire certains acteur de talent (bon sang Donald Sutherland) dans ce désastre ? Revoyez les délicieusement crétins Deep Impact, Le Jour d’Apres ou 2012 à la place, mais par pitié, si quelqu’un me lit un jour, ne donnez pas d’argent à cette #!&@e, ne participez pas à ça, vous vous en voudrez. Je m’en veux.

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