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[CRITIQUE] Uncle Frank – Pas celui des repas de Noël

Récompensé du Prix du Public au festival de Deauville en 2020, Uncle Frank s’est révélé être l’antidote réjouissant de la compétition, un film qui a su fédérer les spectateurs. Dans une époque marquée par les discordes face à la diversité, l’art offre aux créateurs une tribune pour véhiculer des messages de paix et de tolérance, suscitant ainsi des prises de conscience et des changements. Récemment, nous avons évoqué le Miss, réalisée par Ruben Alves, qui, elle aussi, peut porter ce type de message en explorant la non-binarité au sein d’une cérémonie populaire. C’est en ce jour de Thanksgiving que le long-métrage, dirigé par Alan Ball, voit le jour. S’inspirant de l’autobiographie romancée de son réalisateur, ce long-métrage promet de vous toucher en profondeur.

En 1973, Beth, encore adolescente, quitte son milieu rural pour poursuivre ses études à l’Université de New York, où enseigne son oncle Frank, un éminent professeur de littérature. Elle découvre bientôt son homosexualité et la relation discrète qu’il entretient depuis longtemps avec son compagnon Wally. Cependant, le décès soudain du patriarche grincheux de la famille, Mac, oblige Frank à revenir dans son passé, accompagné de Beth et Wally, pour assister aux funérailles. Au cours de ce voyage, il doit affronter les démons de son passé et faire face à sa famille une fois sur place.

À travers le personnage de Beth Bledsoe, incarné par la lumineuse Sophia Lillis, nous dévoilons progressivement les secrets de son cher oncle, magistralement interprété par Paul Bettany. Sa performance rayonne et pourrait bien figurer parmi ses plus remarquables à ce jour. Bien que son nom puisse être négligé lors des prochains Oscars, son jeu d’acteur seul justifie le visionnage de ce long-métrage. Alan Ball, connu pour avoir créé Six Feet Under et True Blood, ainsi que pour son scénario acclamé dans le magnifique American Beauty de Sam Mendes, parvient à insuffler une authentique sincérité à son récit. L’identification aux trois personnages est quasi instantanée, tant l’écriture et l’interprétation dégagent une profondeur émotionnelle. Le quotidien dépeint reste malheureusement d’actualité pour de nombreuses personnes de la communauté LGBTQ+, toujours confrontées aux jugements tant privés que publics, malgré les avancées en matière de tolérance. Uncle Frank pourrait être un nouvel éveil pour certains membres de cette communauté, les incitant à assumer leur différence au sein de leur famille et dans le monde.

Baigné d’une lumière orangée évoquant l’esprit réconfortant du festival Sundance, le film suit les traces de Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton et Valerie Faris, sans en rougir. Porté par la bonne humeur de Sophia Lillis et le talent comique de Peter MacDissi, ce long-métrage oscille avec brio entre rires et larmes, bonheur et peine, prospérité et adversité, avec une authenticité rare dans ce registre. Cependant, on peut lui reprocher la rapidité peut-être excessive de son troisième acte. Après un court quart d’heure, dont une conversation poignante avec la mère, le film se conclut presque précipitamment, laissant un sentiment de frustration chez le spectateur. Ce dernier acte aurait sans doute gagné à être prolongé d’une dizaine de minutes supplémentaires pour éviter cette déception.

Malgré quelques imperfections de mise en scène, notamment un montage parfois abrupt des scènes de flashbacks, Uncle Frank suscite l’envie et respire la tolérance. Grâce à son écriture authentique, Alan Ball parvient à créer une œuvre profondément touchante, offrant une expérience cinématographique riche en émotions. Bien que le sujet abordé soit empreint de tristesse, le film parvient tout de même à rayonner d’une certaine « gayeté ».

Uncle Frank de Alan Ball, 1h35, avec Paul Bettany, Sophia Lillis, Peter MacDissi – Exclusivement sur Prime Vidéo