[CRITIQUE] Mourir à Ibiza – Errance sentimentale

Les écoles de cinéma sont-elles un bon moyen de faire du cinéma ? C’est une question que l’on peut légitimement se poser en vue du nombre plus qu’important d’élèves sortant de ces écoles et du peu de cinéastes qu’on retrouve sur nos écrans. Qu’est-ce que les élèves y apprennent ? Quelles sont les bases qu’ils pourront développer avec leurs propres styles pour créer des œuvres artistiques à la fois accessibles et pertinentes . Est-ce qu’ont leurs apprends à faire partie d’un système de production déjà pourri jusqu’à la moelle, et duquel ils seront tous esclaves durant leur carrière aussi brève soit-elle ? Est-ce qu’ont leurs apprends à faire partie d’un mouvement élitiste de création d’œuvres qui ne seront visualisées que par un petit panel de personnes déjà habituées à ce genre de longs-métrages ?

Qui sommes-nous pour savoir ceci ? Nous les spectateurs n’avons accès qu’au produit fini après tout. Cependant ce sont les questions que je me pose à chaque fois que je regarde le premier film d’un ou de plusieurs jeunes réalisateurs fraichement sorti d’école. Mourir à Ibiza est un film réalisé par Anton Balekdjan, Matteo Eustachon et Léo Couture.

Le film raconte une histoire de romance entre 4 jeunes adultes découpée en 3 actes. Léna est une jeune parisienne qui à rencontrée Marius lors d’un été à Marseille. En cette année 2019 elle décide de venir le rejoindre à Arles pour les vacances d’été. Ce dernier étant malheureusement retenu sur son lieu de travail elle rencontre Maurice et Ali. Deux jeunes hommes vivant dans la petite ville d’Arles. Et c’est ainsi que commence une histoire de jeunesse et de maladresse qui durera trois étés.

Le découpage en trois actes est un découpage avant tout technique. Le film a bel et bien été tourné sur 3 années entre 2019 et 2021 et ce sur 3 lieux différents. Nous suivons alors l’évolution de ces acteurs, de ces personnages mais surtout de son équipe technique. Un parcours qui est désagréable! Partant de cadrages et de mouvements dignes des plus belles heures des feuilletons AB production jusqu’à une maîtrise plus précise de l’image, du montage et du rythme. Nous suivons le même parcours de croix que ces jeunes étudiants cinéastes, avec leurs diverses tentatives, et ratages de mieux en mieux maîtrisés. D’où la citation de Beckett : “Essayer encore. Rater encore. Rater mieux.

Mais attention, le film n’est clairement pas raté ! Il brille par une réalisation fraiche qui atteint des sommets notamment avec sa dernière partie et ses chansons. Les acteurs ont une évolution bienvenue au fil des années du récit et leurs changements physiques viennent captiver le spectateur. En soi d’un point de vue technique, le film évolue et devient agréable à regarder. Là ou le film pose quelques problèmes c’est dans son écriture.

L’écriture du film est entre le concept et le futile. Dommage ! On sent ces acteurs tenter de se dépatouiller avec le peu de texte et le peu de dialogues qu’ils bénéficient pour interagir entre eux, rendant toutes leurs conversations gênantes. Ce qui contraste grandement entre les moments de complicité musicales et de vies loin de la caméra. L’ensemble reste étrange. Alors en soi pourrait y voir une critique des nouvelles générations qui n’arrivent plus à communiquer et ne savent plus comment exprimer leurs amours, néanmoins, cela reste quand même perturbant, au point de se poser une question à plusieurs reprises : “mais pourquoi ces jeunes sont amis?”, c’est un point faible important du film. Un manque de lien fort et impactant qui nous laisse toujours dans l’attente du prochain chapitre… En vain ?

Étant donné le titre du film on pourrait s’attendre à une envolée lyrique et punk. Une explosion entre la fête, les sens, et le désir. Un cocktail explosif sous acide entre Gaspard Noé et Kechiche, mais il n’en est rien. Mourir à Ibiza conclu sur une fin mais quel est telle ? Celle de l’insouciance ? QUI MEURT A IBIZA ? Dommage, car quand bien même les personnages se font et se défont hors caméra, il manque à cette histoire une forme de panache ! Ce qui aurait pu remonter avec intensité ce récit en dents de scie de 3 étés à la saveur fade….

Mourir à Ibiza est un bon premier film, car il démontre avec douceur et parcimonie les talents de ces trois jeunes réalisateurs. Leurs sens du détail face à la caméra. La manière dont ils ont évolué au cours de leur parcours scolaire. Le problème c’est qu’ils s’embourbent dans ces défauts d’écritures et son manque de liant entre chaque chapitre. Le film nous reste plein de belles promesses pour la carrière de ces jeunes réalisateurs. Allez-y avec panache messieurs, je vous retrouve au prochain film !

Note : 2.5 sur 5.

Mourir à Ibiza au cinéma le 7 décembre 2022.

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