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[CRITIQUE] Escape from Mogadishu – S’échapper de la population stéréotypée

Le dernier film d’action de Ryoo Seung-wan, Escape from Mogadishu, se déroule en 1991 pendant la guerre civile en Somalie, et les premiers problèmes du film viennent dès le début, où sur la musique originale comportent des tambours et des chants, comme dans un film hollywoodien raciste des années 30. Hélas, au lieu d’être une aberration plutôt triste, cela est assez révélateur de la manière dont les Somaliens, et par extension les Africains, et par extension encore, les Noirs, sont dépeints dans le film.

En 1991, la Corée du Sud faisait vigoureusement pression pour devenir membre de l’ONU, et les votes des États membres étaient cruciaux pour cet effort. Apparemment, si l’on en croit ce film, le vote unique de la Somalie était d’une importance capitale pour le gouvernement de la Corée du Sud. La Corée du Nord se battait également pour obtenir une place au sein de l’ONU, c’est pourquoi le film détaille initialement des affaires assez fastidieuses concernant la bataille entre le Nord et le Sud pour s’attirer les faveurs du gouvernement somalien et obtenir ce précieux vote. À cette fin, Han Shin-sung (Kim Yoon-seok), l’ambassadeur sud-coréen en Somalie, et l’agent de renseignement Kang Dae-jin (Zo In-sung), sont dans la capitale somalienne de Mogadiscio pour rencontrer le président de la Somalie, et leur plan consiste essentiellement à soudoyer le président avec des cadeaux pour le rallier à leur cause. C’est assez simple. Leurs homologues nord-coréens, le diplomate Rim Yong-soo (Huh Joon-ho) et son assistant Tae Joon-ki (Koo Kyo-hwan), sont également dans la capitale, déterminés à bloquer les efforts des Sud-Coréens et à prendre le dessus. Finalement, nous arrivons à la partie « évasion » de ce Escape from Mogadishu. Pendant que les diplomates coréens s’adonnent à leurs jeux de dupes, un soulèvement populaire émerge contre le gouvernement corrompu de la Somalie, qui se transforme bientôt en véritable guerre civile. Soudain, les Somaliens ne sont plus aussi hospitaliers envers leurs invités coréens, et l’ambassade de Corée du Nord est bientôt détruite par les rebelles. Les Nord-Coréens entreprennent un dangereux périple jusqu’à l’ambassade de Corée du Sud, suppliant qu’on les laisse entrer. À contrecœur, les Sud-Coréens acceptent et, bien que les deux parties se méfient l’une de l’autre, elles comprennent rapidement qu’elles doivent travailler ensemble pour sortir du pays.

© Kinovista
© Kinovista

*Alerte spoiler* (bien que le titre du film soit déjà une sorte de spoiler) les Coréens s’en sortent presque intacts, et il y a un certain adoucissement des barrières entre le Nord et le Sud, et juste un soupçon d’espoir pour une réconciliation éventuelle. Tout cela est très bien et édifiant, à l’exception d’un énorme problème : la réalité extrêmement gênante qu’une guerre civile africaine sanglante et tragique soit utilisée comme toile de fond pour une sorte de plaidoyer pour l’unification de la Corée. Cela permet au film de se livrer à une vision exagérément déformée et stéréotypée de l’Afrique, et pas un seul Somalien n’apparaît comme un véritable personnage – ils sont surtout dépeints comme des sauvages sans cervelle et assoiffés de sang. Ils sont surtout représentés comme des sauvages assoiffés de sang, quand ils ne sont pas des fonctionnaires corrompus et cupides. Dans sa présentation réductrice et irréfléchie, Escape from Mogadishu n’est que le dernier d’une longue et ignoble lignée de films qui ne présentent l’Afrique que comme un paysage cauchemardesque et infernal. Tout cela est très regrettable pour des raisons évidentes, et c’est le plus gros problème du long-métrage, mais d’autant plus que Ryoo Seung-wan est un réalisateur parfois génial qui a réalisé un grand nombre de films d’action véritablement plaisants, son dernier étant Battleship Island. Le fait qu’Escape from Mogadishu soit l’œuvre de ce dernier et non d’un inconnu rend la déception encore plus grande.

Bien sûr, il y a du talent cinématographique, dont le meilleur exemple est la fuite en véhicule de l’ambassade sud-coréenne assiégée. Et c’est ce qui me pousse à vous encourager à le découvrir. C’est une œuvre imparfaite dans son fond nauséabond et plutôt douteux mais qui reste intéressante dans sa mise en scène et dans son questionnement politique.

Note : 2.5 sur 5.

Escape from Mogadishu disponible à l’achat et à la location sur viva.videofutur.fr

Sortie le 28 juillet 2022.