[CRITIQUE] My Zoé – Un drame inabouti…

La production franco-germano-américaine My Zoé avait de quoi surprendre, mêlant le quotidien trouble d’une famille séparée par le divorce et la garde alternée, à l’accident irréparable de l’enfant. Isabel, incarnée par Julie Delpy elle-même (également réalisatrice), ne souhaite pas se réconcilier avec son ex-mari (Richard Armitage), qui ne cesse de la solliciter pour lui accorder une autre chance, qu’elle puisse également reconnaître ses torts, afin que la famille soit de nouveau réunie. En réalité, Isabel tente déjà de se reconstruire, sentimentalement épanouie avec son amant, et heureuse lorsqu’elle est avec sa fille pendant les périodes de garde lui étant attribuées.  Zoé a un accident, elle ne s’en remettra pas. Isabel décide alors de prendre contact avec un neurologue (Daniel Brühl), afin de le solliciter pour une expérience…

Que dire sur ce film, ambitieux certes, mais finalement handicapé par le traitement que Julie Delpy inculque à ses personnages. Les cinquante premières minutes sont très prometteuses, la rupture du lien familial entre la fille et sa mère, la perte de repères et la sensation de ne connaître qu’une moitié de Zoé est tout à fait pertinente dans l’approche de la garde alternée, véritable épreuve pour tout parent n’y ayant jamais été confronté. Les performances des acteurs sont tout à fait convaincantes, Delpy la première comme Armitage, et certaines scènes plutôt touchantes, les parents se retrouvant seuls devant leur fille à l’hôpital. Le traitement des personnages paraît nuancé également, Isabel ne se remettant jamais en question et rejetant la faute sur son ex-mari, ayant la sensation d’être dépossédé de ses droits. Pourtant, My Zoé ne fonctionne jamais vraiment très bien et s’avère complètement inabouti lorsqu’il s’apprête à entamer sa dernière partie, où Isabel tente de contacter ce neurologue afin de cloner sa fille décédée suite à l’accident, malgré ce que cela implique éthiquement. Tout ce qui avait été proposé auparavant semble soudainement s’écrouler, la faute à un certain « pathos » quand même déjà un peu présent sur la première heure (bien que condensé) où Delpy ne cessait de nous faire comprendre que oui, son personnage souffrait et que son mari ne lui facilitait pas la tâche…

Dès lors, le film ne semble plus que se reposer sur cette expérience interdite, à la fois folle et démesurée, d’ailleurs incompréhensible au départ pour le scientifique puis compréhensible… sans que l’on puisse même saisir les raisons qui l’amèneront à l’accepter. Bien sûr, cela n’est pas très crédible en plus d’être éthiquement problématique, malgré la douleur ressentie par le personnage principal, alors se pose la question : de quoi My Zoé parle véritablement ? De tout et de rien. Là est le souci majeur. Justifier le franchissement des barrières de l’éthique en se reposant sur le ressenti du personnage principal (pas suffisamment développé, encore une fois) reste malheureusement assez pauvre. Et cela est pourtant la seule chose à retenir de ce film, maladroitement écrit, malgré une première partie, il est vrai, pas si désagréable. L’ex-mari n’aura pas son mot à dire bien entendu, sa réaction suite à la connaissance des intentions de son ex-femme paraît absurde, lui qui était représenté comme violent et maniaque du contrôle, désormais le premier à se taire et à accepter ce choix, pourtant, pas des plus faciles. Puis il y a cet happy-end, touchant dira-t-on, peut-être… mais manquant résolument de crédibilité pour convaincre, trop expédié en deux minutes et très paradoxal en comparaison du portrait des personnages en début de film.

My Zoé tente de manier plusieurs intrigues en un seul film, celle d’une garde alternée difficilement vécue, du traumatisme psychologique après l’accident de l’enfant, et les conséquences sur la mère qui tentera l’expérience de clonage sur sa fille décédée. Rien n’est jamais suffisamment convaincant malheureusement, l’émotion est d’abord présente puis disparait au fur et à mesure que l’on nous rappelle la tristesse du personnage principal. A trop vouloir en raconter, Delpy évoque des thématiques intéressantes mais les exploite mal. Cette fin est proche de la niaiserie, presque fantaisiste et résulte d’une écriture bâclée de la part de la réalisatrice, sur ses personnages. La seule sensation restante, celle d’avoir contemplé un gâchis incompréhensible.

My Zoé au cinéma le 30 juin 2021.

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