[CRITIQUE] Horror in the high desert 1 & 2 – Mystérieux dyptique

Horror in the High Desert est un mockumentaire réalisé par Dutch Marich en 2021. Il s’agit d’un faux documentaire relatant la disparition d’un randonneur au cœur du Nevada et de l’enquête entourant ce mystère. La première heure et demie est relativement classique, ressemblant à un thread horreur de Squeezie, à la différence que les blagues sont absentes et les accents américains sont plus présents. Les témoignages de différents personnages ayant connu le randonneur disparu se multiplient pour nous permettre de mieux comprendre le contexte. L’idée novatrice d’Horror in the High Desert (que nous abrégerons en HHD pour plus de concision) est de nous laisser face à ces nombreuses interviews. Inconsciemment, nous élaborons diverses théories sur l’identité de la personne à l’origine de la disparition et son mobile. Le film se transforme ainsi en un polar, où nous endossons le rôle d’un enquêteur cherchant à résoudre cette énigme. Bien que cela puisse paraître un peu soporifique, la durée du film est suffisamment courte pour nous tenir en haleine jusqu’aux trente dernières minutes.

Dans le dernier tiers, la police découvre un “found footage” représentant les derniers instants du randonneur disparu. Le film bascule alors d’un mockumentaire classique à l’intégration d’un élément maintes fois utilisé dans le genre de l’horreur : la vidéo trouvée (ce qui justifie un budget réduit). Pourtant, ce changement radical insuffle une nouvelle vie au film, le plongeant véritablement dans l’horreur. Des sons étranges, des visions mystérieuses, et surtout un antagoniste violent font enfin honneur au titre d’Horror in the High Desert. Le désert a toujours été, depuis les débuts du cinéma, un lieu emblématique de l’horreur américaine. C’est là où de nombreuses populations ont été décimées par les colons américains pendant des décennies, expliquant en partie la brutalité et la violence présentes dans les westerns. Dans les années 40, le désert est devenu le site de tests de bombes atomiques, ajoutant une couche de mystère et de douleur à un endroit déjà inhospitalier. Le contexte fait du désert un endroit idéal pour l’horreur, en plus de ses caractéristiques évidentes, car les personnages y sont isolés et ne peuvent échapper à l’horreur. C’est précisément ce que Dutch Marich tente de nous faire ressentir dans les trente dernières minutes de son film. C’est dommage que nous devions supporter la première heure auparavant.

Ayant gardé un bon souvenir du premier volet, je suis naturellement intrigué lorsque je lance la suite, Horror in the High Desert 2: Minerva. J’apprécie généralement les titres de films d’horreur, car ils révèlent souvent l’intention du réalisateur. Dans ce cas, le titre indique la volonté de relier ce deuxième opus au premier, en continuant à explorer ce désert inhospitalier, une réalité contemporaine pour certains Américains. Cependant, le sous-titre “Minerva” ajoute une dimension supplémentaire. Le film cherche à étendre son univers horrifique tout en conservant un lien avec l’enquête précédente. Dutch Marich, toujours à la réalisation, suit la même structure narrative. La première partie du film propose une variété de documents : extraits de faux reportages, conversations téléphoniques, vidéos issues d’une banque d’images, et des found footages provenant de divers personnages (peut-être même les tueurs ?). Dans la seconde partie, il justifie le terme “horreur” en nous offrant une vingtaine de minutes en huis-clos, utilisant uniquement une dashcam et quelques caméras à vision nocturne, les fameuses caméras embarquées. L’objectif est de prendre le temps d’installer l’horreur et de la faire éclater lors d’une séance de traque similaire à celle du premier film. Bien que le dispositif soit à nouveau efficace en pratique, on déplore un certain manque d’ambition pour une suite dont l’affiche promettait bien plus. Le mystère entourant l’univers d’Horror in the High Desert persiste, et nous ne pouvons nous contenter que de maigres théories basées sur de rares indices. Cependant, le travail sonore demeure excellent, la peur étant principalement générée par des bruits de pas, des craquements et d’autres éléments sonores mystiques portés par le vent du désert. De nombreux effets sonores contribuent à créer l’atmosphère horrifique du film, même si une violence dans le champ, attendue mais finalement absente, laisse une impression d’inachèvement.

C’est quoi le cinéma de Dutch Marich avec cette série de films mystérieux ? En revisitant le même scénario, le réalisateur affine certaines idées, en particulier l’ambiance sonore qui devient une véritable source d’horreur en hors-champ. Cependant, il tombe dans la répétition de certaines séquences. Je pense notamment à ces found footages en vision subjective, qui concluent les deux films et rappellent les excellents traitements de l’attente que l’on trouve dans les jeux vidéo comme Outlast. On ressent une angoisse constante face à l’inconnu, mais malheureusement, le dénouement tant attendu tarde à se concrétiser, sans jamais vraiment exploser. L’horreur dans le désert profond semble étrangement timide, se contentant de susurrer de loin sans jamais vraiment se dévoiler. Cependant, malgré cette réserve, l’attente pour le troisième volet est palpable (et un quatrième est même déjà prévu). Avec une mise en place aussi solide, nous ne pouvons qu’espérer une suite plus satisfaisante. En deux longs-métrages, le cinéaste a réussi à jouer habilement avec son propre dispositif, tout en tournant en dérision les émissions télévisuelles de ce genre et en dépeignant la violence de cette région. Il y a donc matière à continuer à suivre cette saga de près.

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