[CRITIQUE] Expendables 4 – La sortie d’EHPAD trimestrielle 

Expendables 4, la plus récente itération d’une franchise autrefois prometteuse, se présente malheureusement comme une triste illustration de la médiocrité qui caractérise le cinéma d’action contemporain. Dans un monde où des œuvres cinématographiques telles que Rambo ou Piège de cristal ont érigé des standards élevés au sein de ce genre, cette dernière incarnation échoue lamentablement à capturer l’essence même de ses illustres prédécesseurs. Malgré un casting étoilé composé de vétérans de l’action, le réalisateur Scott Waugh semble davantage investi dans la surenchère d’explosions et les artifices visuels de bas étage que dans l’élaboration de personnages complexes ou la création de séquences d’action mémorables. L’on ne peut que constater, avec un zeste d’amertume, que cette production est le reflet flagrant de ce qui se produit lorsque la complaisance et l’indifférence l’emportent sur l’aspiration à procurer un divertissement digne de ce nom.

Dès les premières minutes, il devient évident que le film se désintéresse de la psychologie des personnages, du développement émotionnel, et de la construction d’une intrigue qui saurait captiver. Alors que Rambo réussissait à insuffler une profondeur au personnage principal, John Rambo, en explorant les séquelles des horreurs de la guerre du Vietnam, cette dernière bêtise d’action se contente de montrer un Sylvester Stallone vieillissant, se lamentant sur ses blessures passées. L’occasion d’explorer les tourments d’un héros vieillissant est tragiquement gâchée, nous laissant face à un vide émotionnel béant. Le  John Rambo campé par Stallone est un protagoniste complexe, hanté par les atrocités de la guerre, et son cheminement émotionnel forme le pivot de l’intrigue. Ici, les scénaristes ne parviennent jamais à doter ses personnages de cette profondeur et de cette subtilité.

Bien qu’il rassemble un impressionnant ensemble d’icônes de l’action, de Jason Statham à Dolph Lundgren, il les réduit, au lieu d’en tirer pleinement parti, à des rôles marginaux, laissant place à de nouvelles venues telles que Megan Fox et 50 Cent, dépourvues de crédibilité dans le registre. On peut l’illustrer avec Statham, acteur de renom dans le domaine, ayant brillé dans des films tels que Hyper Tension et  Le Transporteur,  voit son potentiel sacrifié ici, où il est cantonné à des dialogues insipides et à des séquences dénuées d’intérêt. Au lieu de rendre hommage aux légendes de l’action, le film sacrifie ses acteurs au profit d’une distribution peu inspirée.

Le mépris envers le public transparaît incontestablement dans la piètre qualité des effets spéciaux. Les scènes d’action sont confuses et dénuées d’originalité. Les effets spéciaux semblent émaner d’un jeu mobile bas de gamme, donnant l’impression que le film a été réalisé avec un budget minimal, malgré un coût de production atteignant les 100 millions de dollars, soit 20 millions de plus que The Creator. Le réalisateur Scott Waugh semble indifférent à l’harmonie visuelle, créant des séquences où les personnages semblent par moments ne pas partager le même espace. Une lacune qui anéantit toute immersion et confère au film une fadeur visuelle patente. Par contraste, dans Expendables 2 ou encore dans les films de John McTiernan, les effets spéciaux étaient palpables car les explosions, les cascades, et tous autres artifices de cinéma étaient réalisés sur le tournage, par des artificiers et/ou des cascadeurs. Là ça échoue lamentablement à capturer cette même énergie et cette intensité visuelle, car tout est sur fond vert, sur ordinateur. Que c’est laid.

L’intrigue se révèle aussi prévisible qu’un western spaghetti suranné. Un groupe de méchants complotant pour déclencher une guerre nucléaire entre les États-Unis et la Russie, et seule l’équipe des Expendables peut les en empêcher. Un schéma narratif exploité à outrance dans le cinéma d’action, sans que Expendables 4 n’apporte le moindre souffle de fraîcheur à cette trame éculée. Les rebondissements se profilent avec une évidence embarrassante, les dialogues se révèlent dénués de profondeur, et les enjeux sont si artificiels qu’ils ne suscitent aucune émotion. En plus, il ose  introduire des talents asiatiques tels que Tony Jaa et Iko Uwais, réputés pour leurs performances exceptionnelles dans des films tels que The Raid et Ong-bak. Toutefois, au lieu de tirer profit de leur présence, la bande de vieux 4 les relègue à des rôles sous-exploités. Les combats, qui auraient pu constituer le point fort du film, se trouvent maladroitement chorégraphiés et montés de manière à dissimuler les compétences des acteurs. C’est une perte incommensurable de talents qui auraient pu apporter une dimension nouvelle au film. Dans les films de Gareth Evans, la chorégraphie des combats est acclamée pour son intensité et son réalisme, élevant ses films martiaux au statut de classique du genre. Malheureusement, le cinéma américain néglige délibérément le potentiel de ses acteurs asiatiques en matière d’action au profit de faire passer les vieux scoliosés comme les meilleurs des meilleurs. 

Expendables 4 s’efforce désespérément de capitaliser sur la nostalgie des films d’action des années 80 et 90 en réunissant des stars emblématiques de cette période révolue. Cependant, le film fait preuve d’un mépris flagrant envers ces classiques. Au lieu de rendre hommage à ces figures et aux classiques du genre passés, Scott Waugh les imite maladroitement, sans jamais atteindre leur qualité ou leur profondeur. Il s’agit d’une tentative cynique de capitaliser sur la nostalgie sans véritablement saisir ce qui a rendu ces films mémorables. On est face a un plantage de haut niveau, qui ferait passer les thrillers de Liam Neeson comme des propositions au minimum correct. Un seul conseil à suivre, pour de la bonne action, foncez voir des exubérances comme Jawan ou des honnêtes tentatives comme Farang.

Expendables 4 de Scott Waugh, 1h43, avec Jason Statham, Sylvester Stallone, Andy Garcia – Au cinéma le 11 octobre 2023.

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