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[CRITIQUE] Censor – Un amusant retour aux video nasties

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Par Louan Nivesse

Avant de vous plonger dans le très amusant nouveau film d’horreur Censor, vous devez savoir ce qu’est un video nasty. Terme familier inventé au Royaume-Uni dans les années 1980, les video nasties étaient les films distribués sur cassettes vidéo qui étaient critiqués pour leur contenu violent par la presse et diverses organisations religieuses. Dans sa première réalisation, Prano Bailey-Bond place ces films graphiques au centre de l’histoire d’une censeuse de cinéma (Niamh Algar) qui, après avoir visionné une vilaine vidéo étrangement familière, entreprend de résoudre le mystère passé de la disparition de sa sœur et se lance dans une quête qui abolit la frontière entre fiction et réalité.

Tout en opérant dans le cadre des familiarités du genre de l’horreur que les fans espèrent, Prano Bailey-Bond fait également preuve d’une connaissance et d’une appréciation plus profondes du genre avec le lien central de l’intrigue avec les video nasties. L’amusement que Bailey-Bond apporte à l’écran avec les meurtres, les titres et même les jaquettes de VHS sera l’un des moments les plus mémorables du film. Et sur un plan plus personnel, il est clair que Bailey-Bond exprime sa voix à travers le personnage central Enid (Niamh Algar), une jeune et belle femme qui est plus intéressée à se perdre dans sa carrière de fantaisie macabre qu’à suivre un chemin de vie plus traditionnel. Censor présente un point de vue féminin fort et valorisant sur le fait d’être une femme à la fois sur le lieu de travail et en danger, ce à quoi Algar joue tout le temps.

Comme une sensation de déjà-vu.

Il est toujours plaisant de voir un film où le mal n’est pas seulement un croque-mitaine, mais quelque chose de plus profond, de plus spirituel, et la descente que nous faisons en suivant l’effilochage psychologique d’Enid est un voyage très ludique. Pour un film qui connaît si bien les video nasties et le plaisir de mettre en scène la violence au cinéma, les bouleversements de Censor visent la paranoïa plus grisante de l’instabilité mentale plutôt que les séquences d’horreur qui font jaillir le sang. Il n’y a qu’un ou deux jump scares et quelques moments de slasher, le tout traité de manière assez légère. Si Censor s’était permis de s’adonner à l’horreur la plus sanglante du genre, je me demande quel niveau de plaisir nous aurions pu avoir dans cette configuration.

Pour un film indépendant de modeste envergure, il y a tout de même des compétences cinématographiques remarquables. La réalisation capture le style britannique des années 1980, où l’on pourrait croire que Stranger Things se passe de l’autre côté de l’étang. Le retour à l’époque des VHS sera toujours apprécié et le fait de voir Enid regarder ces films d’horreur au sein de ce film d’horreur donne à Censor une profondeur supplémentaire. Et puis, bien sûr, il y a les éléments du slasher qui sont bien gérés. Ce que j’ai trouvé le plus impressionnant, ce sont les moments où le genre cinématographique change, lorsque Enid perd le sens de la réalité et que nous entrons lentement dans l’écran et dans le monde de l’horreur. L’utilisation progressive de la couleur qui consume son monde terne ainsi que le cadrage incliné de la caméra se transforment en un vaste monde de vision et de perspective.

Non, ce n’est pas Videodrome de ô David Cronenberg.

Pour un film comportant des morts choquantes et effroyables, Censor finit par être plus doux qu’un film gore à outrance. Cependant, la vérité humaine plus complexe que Bailey-Bond exprime ici est encore plus terrifiante dans sa relativité. Il est révélateur qu’après la disparition de sa sœur pendant son enfance, Enid grandisse et devienne une censeuse de films, choisissant de s’immerger dans des contenus aussi horribles et violents, s’efforçant à elle seule de soustraire les moments les plus horribles aux yeux du public (et surtout des enfants). Mais lorsqu’une vidéo particulière devient le centre d’une actualité nationale pour un meurtre inspiré de la vie réelle, Enid est ébranlée, et le traumatisme de son horrible passé la hante à nouveau. Bailey-Bond montre les moyens inconscients par lesquels nous essayons d’éviter les événements trop difficiles à comprendre dans un moment perturbant et les mondes que nous nous créons alors pour y faire face. En demandant au public quelles peurs nous fuyons et quelles actions nous entreprenons pour tenter de chasser ces souvenirs insupportables de nos esprits, Censor est un film qui restera dans nos mémoires.

D’une durée de 84 minutes, Censor est parfait pour les spectateurs occasionnels qui cherchent à s’amuser avec un film d’horreur, ainsi que pour les amateurs d’horreur plus chevronnés qui veulent se délecter d’un retour aux video nasties. Si vous vous demandez à quoi pourrait ressembler la réimagination de Midsommar et Mandy par un employé de vidéoclub, vous devez découvrir Censor rapidement.

Note : 3.5 sur 5.

Censor le 26 janvier 2022 en VOD et sur OCS.

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