Difficile de rivaliser avec le brillant Spider-Man : Across the Spider-Verse dans la catégorie des adaptations de comics en animation, surtout si l’on reprend la même esthétique visuelle. En effet, reproduire l’effet comics dans un film en 3D pour créer un impact visuel puissant a bien fonctionné dans cette nouvelle adaptation des “Tortues Ninja“, du moins du point de vue graphique. Cependant, en ce qui concerne le scénario, c’est plutôt classique…
Ninja Turtles: Teenage Years est réalisé par Jeff Rowe et Kyler Spears, tous deux connus pour leur travail sur d’excellentes séries d’animation telles que Gravity Falls, We Bare Bears et la série Tortues Ninja de 2012, et produit sous la tutelle de Seth Rogen. Rogen poursuit ainsi sa quête de réaliser ses fantasmes d’enfance et d’explorer sa relation avec l’enfance à travers ses références. Ensemble, ils livrent un film qui raconte l’origine des Tortues : Michael Angelo, Donatello, Raphael et Leonardo, ainsi que celle de leur maître et père adoptif, Splinter. Nous les suivons depuis leur transformation jusqu’à leur adolescence, ainsi que leurs premiers affrontements, tant intérieurs avec le monde qui les entoure, qu’extérieurs avec SuperFly, qui souhaite conquérir le monde. Rien de très original ? En effet, et pourtant…
Revenons d’abord aux personnages principaux du film. Nos quatre compagnons chéloniens, tous adolescents, sont en proie à un profond mal-être : l’adolescence. Leonardo rêve d’une petite amie, Michelangelo a des problèmes de gestion de sa colère, et Donatello et Raphael aspirent simplement à pouvoir aller au lycée et être populaires. Les doubleurs des quatre tortues sont tous des enfants, et pourtant nous y croyons, les personnages sont à la fois attachants et exaspérants ! Nous prenons beaucoup de plaisir à suivre ces quatre petites tortues, à les voir grandir, échouer et recommencer jusqu’à ce qu’ils réussissent. Car le message simple délivré par le film est le suivant : accepter les autres malgré leurs différences. C’est un message véhiculé dans de nombreux films pour adolescents depuis longtemps. Pourtant, et malgré le manque de surprise du film, cela fonctionne.
Ce qui donne encore plus d’envergure à tout cela, c’est la direction artistique absolument ravissante. Puss in Boots 2 nous a déjà montré comment transposer cette esthétique visuelle dans les contes. Spider-Man: Into the Spider-Verse et sa suite l’ont porté sur le devant de la scène. Ninja Turtles nous montre qu’il est possible de créer une ambiance sombre et crasseuse tout en la rendant accessible aux enfants. Cela passe également par la mise en scène, qui s’autorise des envolées stylistiques, notamment à travers des scènes de combat en accéléré qui font référence à Old Boy de Park Chan-wook. Cependant, l’humour du film vient ensuite tout remettre en question.
Le film ne se prend pas au sérieux. Certes, cela peut être bienvenu par moments, mais cela devient vite lourd. Les tortues viennent constamment désamorcer les situations du film avec des blagues tantôt amusantes, tantôt navrantes. Ajoutez à cela quelques séquences directement inspirées des années 80 et vous obtenez un niveau d’autodérision affligeant qui nous pousse à vouloir passer rapidement à la scène suivante. L’auteur de ces lignes garde en mémoire une séquence horrible de course-poursuite sur la chanson “What’s Up?” de 4 Non Blondes, une musique qu’il faudrait arrêter d’utiliser depuis que les Wachowski l’ont élevé au rang de monument avec la série Sense8. Le film ne fonctionne que lorsqu’il est sincère et qu’il fait référence à notre époque.
Ninja Turtles: Teenage Years est un bon film de divertissement familial, mais qui s’enlise dans l’autodérision, les références excessives et la facilité scénaristique du “rien n’est grave”. Toutefois, le film parvient à se montrer efficace et sa direction artistique nous donne toujours envie d’en voir plus. Dommage que celui-ci se clôture de manière précipitée, bien que cela suscite néanmoins l’envie de voir une suite, comme annoncé à la fin.
Ninja Turtles: Teenage Years, de Jeff Rowe et Kyler Spears , 1h35, avec Jackie Chan, Nicolas Cantu, Micah Abbey, Brady Noon, Shamon Brown Jr. – Au cinéma le 9 Août 2023