[CRITIQUE] Walk Up – Un lendemain incertain

Dernière réalisation signée Hong Sang-soo, Walk Up suit ce que le cinéaste prend l’habitude de faire depuis de nombreuses années : explorer les circonstances de rencontres, la précision du geste anodin et sa signification. Si l’on suit un réalisateur reconnu auprès du public, celui-ci paraît très seul et désemparé face aux inquiétudes de sa fille qui souhaite évoluer davantage en tant qu’artiste. Par ellipses, jeu sur l’hors-champ, toute la relativité des relations présentées à l’écran se manifeste.

Il n’y a ainsi aucune forme de repos pour nous spectateurs, les plans fixes mettant en avant des personnages fragilisés par leurs ressentis. Comme plongés dans l’incertitude du lendemain, ils ne cessent de converser encore sur des sujets qui les émeuvent particulièrement. Dans l’absence de l’autre, leur inconscient leur parle à l’image de cette belle scène où le cinéaste endormi s’imagine parler à sa compagne dans la pièce à côté. Le rapport au temps a une place assez particulière dans Walk Up, pouvant rappeler quelque peu le cinéma d’Eric Rohmer dans la mesure où la fuite dans le temps des personnages les ramène à des enjeux purement sentimentaux.

Capricci Films

Inscrit dans une forme plus radicale qu’à l’habitude d’Hong Sang-soo, le long-métrage dispose également d’une construction assez passionnante où le protagoniste voit ses doutes se révéler plus il gravit les étages d’une manière non linéaire. Cet immeuble prend l’image d’un manoir hanté en fin de compte, où la mélancolie envahit de plus en plus les figures qui le composent. Ces personnages semblent se mouvoir difficilement, malgré leur désir d’avancer. Ils sont bloqués dans leur temps.

Les scènes de table chères à l’auteur sont bien évidemment présentes, où l’alcool révèle une fois de plus l’adresse des personnes, leurs qualités et quelques manques d’aptitude à se conformer aux autres. Derrière l’ivresse se cache une forme de vérité, mais qui prend tout son sens dans le silence. Il s’installe une tension dramatique assez forte lorsqu’il n’y a plus rien pour eux à raconter ensemble, attendant de retrouver une autre figure de réconfort, plus ou moins proche.

La maladie, le souci professionnel, et l’ambition se confrontent pour le réceptacle de la prétention intellectuelle, alors que l’essentiel se tient devant eux. Au fond, avoir vu Dieu tel que le prétend Byung-soo n’a pas tant d’importance. La temporalité rend ces préoccupations futiles, Hong Sang-soo jouant de la chronologie pour ramener l’homme à un essentiel. Revenant en voiture à peine après l’avoir emprunté, il regarde une femme avec douceur. Il n’a jamais autant apprécié sa présence.

Walk Up de Hong Sang-Soo, 1h37, avec Hae-hyo Kwon, Hye-Young Lee, Song Seon-mi – Au cinéma le 21 février

8/10
Note de l'équipe
  • William Carlier
    8/10 Magnifique
    Un drame simple, sublime.
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