[CRITIQUE] Le Processus de paix – Les 69 commandements

Dans l’océan des comédies romantiques parisiennes, Ilan Klipper réussit le tour de force de proposer un regard original et captivant avec son film Le Processus de paix. Cette comédie douce-amère nous plonge au cœur de l’institution du couple, explorant avec humilité les complexités de cette relation. Dans un Paris moderne, Marie et Simon, interprétés par Camille Chamoux et Damien Bonnard, parents d’un jeune enfant, oscillent entre amour et intolérance. Leur quotidien est fait de scènes de bonheur familial entrecoupées de disputes incessantes. Dans ce tourbillon émotionnel, le couple tente de se réconcilier sans cesse, conscient des enjeux d’une bonne parentalité. Finalement, inspiré par son métier d’enseignant en histoire, Simon propose une solution radicale : la création d’une Charte universelle des droits du couple, visant à résoudre définitivement leurs différends conjugaux.

UNE COMÉDIE LÉGÈRE QUI NE VA PAS PLUS LOIN

Ilan Klipper évite de rendre sa problématique trop lourde, préférant la fantaisie et la bonne humeur pour ausculter les tourments du devoir conjugal. Cependant, entre fantaisie et inconsistance, le film ne parvient pas à trouver un équilibre solide. La mise en scène se contente d’être fonctionnelle et l’écriture manque de surprises, réduisant les personnages à des stéréotypes prévisibles, à l’exception de Marie et Simon. Le spectateur est confronté à une galerie de figures clichées : la femme cougar qui ne pense qu’à ses désirs sexuels, le patron agaçant qui mélange anglais et français, le stagiaire séduisant, la mère libérée, la sœur et le beau-frère envahissants.

Malgré ces clichés, le film parvient à susciter le rire grâce à quelques moments où les personnages brillent en dehors de ces stéréotypes. Une scène de chant avec Sofian Khammes, où Bonnard exprime sa frustration avec une piscine en arrière-plan, ou une scène surprenante aux connotations fécales, qui semble presque déconnectée du reste du film, ont réussi à amuser le public.

© 2022 – Cinéfrance Studios – France 2 Cinéma – Le Pacte – Cinéfrance SAS – Cinéfrance Plus
TRANSMETTRE UN MESSAGE, SANS TROUVER LA MANIÈRE

Le Processus de paix aborde des thématiques importantes, notamment la charge mentale et la hiérarchisation des priorités. Marie anime une émission de radio intitulée “Point G”, où elle effleure des points de vue féministes. Camille Chamoux, qui s’inspire de sa propre histoire, offre une performance louable et insuffle ses idées au sein du film. Cependant, le film ne parvient pas à définir clairement sa tonalité. Il oscille entre la comédie, la parodie du couple et même le drame romantique.

Cette incertitude nuit à la transmission des nombreux et pertinents messages politiques féministes, qui, bien qu’ils puissent capter l’attention du spectateur, se perdent dans un mélange de genres parfois inapproprié. Une scène particulière, où le personnage joué par Camille Chamoux s’oppose à un homme défendant des idées patriarcales dans une soirée, est un exemple de cet écart de ton. Damien Bonnard se range du côté de sa femme en prétendant défendre l’idée d’un monde plus juste pour leurs enfants. S’ensuit une scène de soirée touchante et intemporelle, où le couple se laisse séduire par une femme allemande. Cependant, ce moment de trouple amoureux n’a aucune suite ni conséquence dans le reste du long-métrage.

© 2022 – Cinéfrance Studios – France 2 Cinéma – Le Pacte – Cinéfrance SAS – Cinéfrance Plus
FOCUS SUR LE PLUS INTERRESSANT

Bien que Damien Bonnard et Camille Chamoux soient d’excellents comédiens, leur alchimie sentimentale ne se démarque pas clairement, et ce sont plutôt quelques seconds rôles brillamment interprétés par des acteurs comme Ariane Ascaride ou Jeanne Balibar qui captivent l’attention. Les parallèles tentés entre les disputes conjugales du couple principal et le conflit insoluble et constamment explosif entre la Palestine et Israël ne sont guère convaincants et manquent de finesse.

Le Processus de paix, avec sa comédie légère et douce-amère, propose une réflexion sur la nécessité de vivre malgré les difficultés de la vie de couple. Klipper parvient à maintenir un équilibre entre la gravité de la thématique et la drôlerie de son ton. Le film rappelle que le bonheur et le désespoir coexistent inévitablement. Les moments de joie sont à accepter sans renier la réalité des difficultés. Bien que le film puisse être critiqué pour son manque de profondeur et son traitement inconstant des sujets, il offre néanmoins des moments de rire et d’émotion, et nous incite à embrasser la complexité de la vie de couple avec humilité et bienveillance.

Le Processus de paix de Ilan Klipper, 1h32, avec Camille Chamoux, Damien Bonnard, Ariane Ascaride – Au cinéma le 14 juin 2023.

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