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[RETOUR SUR..] The Crow (1994) – À la vie, à la mort !

The Crow s’apparente à un cauchemar gothique, une fresque sombre et éclatante de Détroit, évoquant les paysages urbains désolés de Batman ou Blade Runner. Dès les premières images, il devient évident que, malgré quelques failles possibles, celles-ci ne se trouveront certainement pas dans la qualité de la mise en scène. Ce long-métrage est non seulement un festin pour les yeux, mais aussi une expérience sensorielle intense, sublimée par une bande-son stridente qui maintient une atmosphère oppressante tout au long. Une tragique ironie plane sur l’œuvre : Brandon Lee, l’acteur principal, a trouvé la mort durant les derniers jours de tournage, victime d’un accident d’arme à feu, alors qu’il incarnait un homme ressuscitant pour venger son propre meurtre et celui de sa fiancée. Le film est d’ailleurs dédié à Lee et à sa fiancée Eliza Hutton, un poignant exemple de l’art qui semble imiter la vie, ou plutôt la mort. Néanmoins, la vision d’Alex Proyas transcende cette tragédie et confère à son œuvre une profondeur qui dépasse son récit funeste.

Brandon Lee incarne Eric Draven, un rockeur brutalement assassiné qui revient de l’au-delà un an après son massacre, lors de la Nuit du Diable. Sa mission est aussi simple que sanglante : venger sa mort et celle de sa bien-aimée Shelly en éliminant un à un ses bourreaux. Chaque acte de vengeance s’enfonce dans une noirceur toujours plus profonde. Sur son chemin, il trouve un allié en la personne d’un policier compatissant (Ernie Hudson), qui comprend ses motivations et partage son dessein. The Crow ne laisse aucun répit au spectateur, enchaînant les scènes à un rythme effréné. Le cinéaste démontre une maîtrise du tempo et de la mise en scène qui évoque le talent de réalisateur·rices tel·les que McTiernan et Bigelow. Ce mouvement incessant pallie en partie les faiblesses de l’intrigue et des personnages, car l’intérêt pour le corbeau est avant tout viscéral. Rien d’intellectuel ne se dégage de ces scènes de violence, aussi stylisées soient-elles. Malgré la virtuosité de la réalisation et la qualité des scènes d’action, il est difficile de considérer cette œuvre autrement qu’une production exemplaire dans le genre du revenge movie.

Le choix de raconter une partie de l’histoire à travers les yeux de la jeune Sarah (Rochelle Davis) est particulièrement judicieux, apportant une profondeur émotionnelle que The Crow n’aurait peut-être pas atteinte autrement. C’est l’une des rares occasions où une narration en voix-off enrichit véritablement le récit, un exploit rare—surtout lorsqu’on se souvient des maladresses de Dark City. Le comique de situation repose en grande partie sur le personnage de Shank, incarné par Angel David, mais celui-ci finit par lasser, sa présence se prolongeant au-delà du nécessaire. En revanche, les flashbacks évoquant les moments heureux d’Eric et Shelly apparaissent trop rares, et l’on regrette de ne pas en voir davantage. Si les films d’action se font plus rares ces dernières années, leur qualité n’a pas nécessairement suivi le même chemin, et The Crow se distingue comme un vestige précieux de son époque, une exception singulière, palpitante, gothique, avec une esthétique gothique, catégorie Evanescence. C’est un épitaphe poignant, un hommage à la fois digne et mémorable.

Quoi qu’il en soit, il est certain que le remake de Rupert Sanders avec Bill Skarsgård, prévu pour le 21 août 2024, ne portera pas la même tragédie en son sein.

The Crow d’Alex Proyas, 1h41, avec Brandon Lee, Michael Wincott, Ernie Hudson – Le 3 août 1994 au cinéma et en blu-ray 4K depuis le le 8 mai 2024 pour ses 30 ans.

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