
En pleine découverte du cinéma de Paul Verhoeven pour la sortie de Benedetta (qui sortira malheureusement en octobre pour les Belges), j’ai décidé de vous parler d’un de mes films préférés de sa filmographie et qui est souvent assimilé à un film d’action brut et sans cervelle mais c’est sous cette surface que Robocop cache un message bien plus important.
Pour les deux du fond qui ne connaissent pas encore Robocop, c’est l’histoire d’Alex Murphy (joué par Peter Weeler), un policier faisant régner la loi dans la ville de Detroit, encré dans un monde dystopique. Arrivé tout frais pour sa première patrouille et travaillant main dans la main avec sa collègue Anne Lewis (joué par Nancy Allen), ils réussissent à trouver le gang le plus connu de Détroit mais malheureusement pour Alex, il se fait tirer plusieurs fois dessus et est laissé pour mort. Ramené à la vie par la compagnie OCP, un important conglomérat militaro-industriel et commercial, qui le transforme en robot-policier qu’on appellera Robocop.

Revenons quelques instants sur la production du film. Initialement, les scénaristes Ed Neumeier et Michael Miner voulaient écrire une histoire de robot policier comme l’avait fait Philip K Dick avec Blade Runner mais ils voulaient aussi un genre du super héros en s’inspirant de Rom, un cyborg chevalier de chez Marvel Comics. Les deux scénaristes ont alors fusionné ces deux univers pour créer ce qui va être plus tard Robocop. Orion Pictures qui avait produit Terminator se léchait les doigts de ce nouveau projet et assurait le grand carton puisque dans les années 80, les films de robots ont la cote. La boite de production se met en tête d’avoir un réalisateur de taille pour voir la naissance de leur nouveau bébé, c’est alors qu’une idée leur vient en tête, pourquoi ne pas choisir Paul Verhoeven pour réaliser le film ? Son Flesh+Blood sorti en 1985 était au nom d’Orion Pictures, alors pourquoi pas. Mais il y a hic dans tout ça, Verhoeven refuse presque le projet en lisant le scénario car pour lui ça ne l’intéressait pas trop et il n’arrivait pas à déceler les arrières-propos du script jusqu’à ce que sa femme y jette un œil et voit tout les sous-textes politiques que renferme Robocop. Verhoeven accepte de faire le film et voilà que commence la production du film et surtout la confection du costume du robot. C’est Rob Bottin, un artiste maquilleur FX qui avait travaillé sur l’excellent The Thing qui s’occupa de rendre le costume de Robocop réel. Il s’inspira en partie du robot dans Metropolis de Fritz Lang comme avait fait George Lucas avec C3PO. Pour être dans le robot, il fallait prendre un acteur assez mince pour que ça soit naturel et pas trop massif donc pas de Schwarzy ni de Stallone, celui qui a été retenu était Peter Weller qu’on avait vu dans Les Aventures de Buckaroo Banzaï à travers la 8ème dimension. Un entrainement assez intense a été réalisé avec un instructeur du département des mouvements de Julliard pour maitriser la gestuelle robotique qui était imposé par son personnage.

Le tournage du film a eu lieu à Dallas et les mates painting fait par Rocco Gioffre retranscrivent parfaitement cette image futuriste et dystopique de Détroit avec ses hauts gratte-ciel et ce vaste paysage urbain crasseux. Certaines animations ont été réalisées en stop-motion comme pour les séquences avec le ED-209 et on peut dire ce que l’on veut avec cette technique, elle permet en un sens de rentre les choses tangibles et naturelles si c’est bien fait et dans ce cas de figure, ça l’est. Il y a d’autres séquences dans Robocop qui expriment tout le génie de Rob Bottin comme dans la scène de « mort » au début du film, où le personnage principal se fait exploser la main par un fusil à pompe, une scène assez choquante et brute comme l’aime faire Verhoeven. Avec l’aide de son équipe de FX, Bottin réussi à insuffler une part de réalisme dans son travail et permet au film de ne pas user de subterfuges numériques qui nuira à l’évolution du film dans le temps. Il y a une autre scène que j’admire et c’est celle vers la fin du film où un des méchants se fait asperger d’un liquide de déchets toxiques, ce qui engendre une mutation du visage assez horrible à regarder. Les designs de Bottin ont été inspirés par le grand maquilleur Rick Backer dans The Incredible Melting Man sorti en 1977.

On peut dire ce que l’on veut sur Robocop mais affirmer que ce n’est qu’un film d’action banal parmi d’autres serait se tirer une balle dans le pied. Dans son œuvre se dresse une satire de la société et de la déshumanisation par le progrès de la technologie, un tout qui fait que Robocop retenti encore maintenant où l’homme actuel veut se rapprocher de plus en plus de la machine en inventant des mécanismes qui lui permet de faire le moindre effort peu importe le cout dépensé. Verhoeven arrive à infuser son idée de l’Amérique caricaturée à l’extrême en nous faisant voir une évolution du capitalisme mais aussi de l’influence des médias, la désensibilisation à la violence en exagérant certaines scènes pour les rendre extrêmement graphiques mais surtout en nous montrant une quête identitaire d’un héros manipulé pour être un symbole de guerre et de marketing. Robocop est un tour de force dans la filmographie de Paul Verhoeven, créant un film d’action brut et intelligent qui lui permet de se hisser dans mes réalisateurs préférés.
Robocop est disponible en VOD, DVD et Blu-ray.
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