Voleuses, le quatrième film sous la férule experte de Mélanie Laurent, s’inscrit dans la riche tradition du cinéma d’action français tout en puisant aux sources des cinéastes américains tels que Michael Bay (avec qui elle a travaillé) et Robert Rodriguez (particulièrement son Desperado). Cette adaptation de la bande dessinée franco-belge La Grande Odalisque nous comble d’un audacieux mélange où le divertissement populaire se marie harmonieusement à un humour contemporain pétillant, le tout enveloppé de séquences d’action qui séduise suffisamment pour être un chouia étonné (on est pas non plus sur du “à couper le souffle” à la Balle Perdue). Nonobstant ses imperfections, le film parvient à se démarquer grâce à un casting de talent et à l’énergie que la réalisatrice insuffle à sa mise en scène.
Cette collaboration entre Gaumont et Netflix (qui nous avez proposé l’affreux Bronx d’Olivier Marchal) s’inscrit dans la lignée des films d’action français contemporains, visant à charmer un large public. Empruntant à l’ère pré-2000 de Luc Besson son art de manier l’action et l’humour, tout en intégrant des éléments de l’école américaine, le film revêt une esthétique éblouissante, portée par une bande sonore énergique qui laisse entrevoir l’influence hollywoodienne, tout en préservant une nuance distinctement française. Les scènes d’action, en particulier la danse précédant l’élimination des mafieux albanais, dévoilent une ambition visuelle assez prometteuse.
Par ailleurs, Mélanie Laurent réussit avec une habileté subtile à fusionner l’humour contemporain et les scènes d’action captivantes. Les bons mots, principalement énoncés par le personnage d’Alex, interprété avec éclat par Adèle Exarchopoulos, apportent une légèreté bienvenue au film. L’introduction au rythme effréné, mêlant de façon habile action et comédie, reflète avec ingéniosité les tendances actuelles du cinéma d’action. Les moments comiques, bien que parfois en proie à l’incohérence, parviennent à divertir et à maintenir notre intérêt.
L’harmonie entre Mélanie Laurent et Adèle Exarchopoulos constitue la pièce maîtresse de Voleuses. Leur interprétation des tueuses et voleuses engendre une alchimie convaincante à l’écran. Le film nous offre une variation française des Charlie’s Angels, mettant en lumière des héroïnes féminines d’une grande résilience. Cette sincérité dans la relation des personnages, bien que le scénario présente quelques aspérités, ajoute une profondeur émotionnelle à l’œuvre, la distinguant ainsi des productions conventionnelles du même genre. De surcroît, Voleuses ose pénétrer un territoire rarement exploré dans le cinéma français, celui de l’action au féminin. Mélanie Laurent réussit avec une maestria éclatante à entremêler les genres, créant un film à la fois drôle, émouvant et spectaculaire. Les instants cinéphiliques, tels que la chorégraphie sur la mélodie “Si j’étais un homme” de Diane Tell, ajoutent une touche d’originalité à l’ensemble.
Au cœur se niche une amitié féminine intense entre les personnages d’Alex et Carole. Cette relation atypique, rarement explorée dans le cinéma, insuffle une profondeur à l’œuvre. Les moments de complicité, de rires et de projets d’avenir dessinent un portrait réaliste de femmes trentenaires cherchant à échapper à une vie criminelle.
Toutefois, en dépit de ses qualités, Voleuses souffre de problèmes de tonalité et d’incohérences. Les transitions abruptes entre les scènes d’action et les moments plus légers rendent parfois la narration chaotique. La conclusion déçoit en optant pour une montée émotionnelle excessive et peu méritée, suivie d’une fin ambiguë. Le film aurait pu davantage exploiter la représentation d’une amitié féminine en évitant de s’engluer dans les clichés hollywoodiens. Cependant, il demeure une proposition intrigante au sein du paysage du cinéma d’action français ainsi qu’une dose de sex-appeal unisexe à se prendre dans la tronche.
Voleuses de Mélanie Laurent, 1h54, avec Adèle Exarchopoulos, Mélanie Laurent, Manon Bresch – Sur Netflix le 1 novembre 2023
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Louan Nivesse6/10 Satisfaisant