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[CRITIQUE] The First Slam Dunk – David contre Goliath

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Par Vincent Pelisse

Si aujourd’hui de nombreux amateurs de mangas s’émerveillent sur les planches de « Vagabond », son auteur, Takehiko Inoue avait pourtant déjà signé une œuvre culte : « Slam Dunk », dont la parution s’est terminée en 1996 au Japon, et 2004 en France. Cela faisait près de 20 ans que l’auteur n’avait plus touché à ces personnages, avec la publication d’un court épilogue. Aujourd’hui, il passe derrière la caméra, pour mettre en scène un long-métrage d’animation intitulé The First Slam Dunk. Un film hybride, entre une adaptation extrêmement fidèle du manga, et des scènes inédites.

Il adapte le dernier match du manga, dans lequel l’équipe de Shohoku affronte Sannoh, les multiples champions en titre du tournoi inter-lycées. Le match sera entrecoupé de flashbacks, dont la grande majorité se concentrent sur Ryota Miyagi, le Meneur de Jeu de Shohoku. Ces ajouts complètement inédits offrent non seulement un développement bienvenu à un personnage un peu moins mis en lumière que les autres, mais aussi une nouvelle perspective sur ce match. En effet, le protagoniste du manga est Hanamichi Sakuragi, le débutant (ou génie ?) aux cheveux roux, et l’on a l’habitude de suivre l’histoire de son point de vue, sauf qu’ici, on a à la fois la mise en scène orientée sur lui, dans le respect des pages et des lignes, mais Inoue ajoute également des phases où l’on vit le match à travers les yeux de Ryota. Cela s’intègre très bien au récit, mais pour un lecteur du manga ce sera forcément un peu déstabilisant de prime abord.

© Wild Bunch Distribution

La démarche est néanmoins très intéressante sur plusieurs points. On comble les trous du passé de Ryota, moins évoqué que celui des autres titulaires (sauf Rukawa, mais son opacité fait aussi son sel), et l’on se retrouve finalement avec un équilibre narratif semblable à celui d’une équipe de basket. En effet, Ryota est le meneur de jeu, celui qui va monter la balle en attaque, et diriger ses coéquipiers pour pouvoir leur distribuer le ballon au moment opportun. C’est exactement ce qui se passe dans le film puisque l’on commence à voir le match sous ses yeux, puis il laissera la place à ses 4 compères, qui auront chacun leur moment pour briller, à la fois dans le match mais aussi sur certains flashbacks.

Ces séquences, notamment celles centrées sur Miyagi, sa vie avec son frère et sa mère, sont particulièrement saisissantes, avec des idées de plans et de montage assez variées. Cependant, le film trouve sa force dans les séquences de jeu. À travers une animation mixant la 2D et la 3D pour dynamiser le trait particulier de l’auteur, on se retrouve face à des personnages dont les mouvements techniques propres au basket sont d’un réalisme ahurissant, que ce soit des enfants, des lycéens, des débutants ou des joueurs confirmés. Qui plus est, Inoue ayant déjà réussi à dessiner les corps et à représenter la physicalité du basket sur ses planches, parvient à aller encore plus loin dans le réalisme ici grâce aux possibilités de l’animation, rendant compte de la dureté de ce sport et de ses contacts. On ressent vraiment que les joueurs doivent se battre physiquement pour (dé)passer leurs adversaires.

À ce propos, et c’est à mettre au crédit du manga aussi, les joueurs de Sannoh, en plus de jouir d’une réputation compétitive intimidante, sont tous assez terrifiants, paraissant comme des ogres, ou des monstres dont le talent et l’expérience sont véritablement écrasants pour cette équipe de Shohoku, qui commence tout juste à faire son trou. Rien ne sera facile pour eux, et même si l’on peut se douter de l’issue du match, cela ne gâche en rien le chemin pour y arriver, puisque Takehiko Inoue maîtrise et exploite parfaitement la dramaturgie que peut offrir le basket-ball, tant visuellement que dans le scénario.

© Wild Bunch Distribution

Pour ceux qui ne connaissent pas le manga et qui se demandent s’ils peuvent voir le film sans avoir lu au préalable, la réponse est oui, en tous cas il est très facile de comprendre les enjeux, et les personnages sont tous très bien caractérisés (en respectant à la lettre les pages et sans ajouts) ce qui permet de bien comprendre leurs motivations ainsi que les liens qui les unissent. En revanche, si le manga vous intéresse vraiment, il est probablement préférable de le lire avant puisque le film vous dévoile le match final de l’œuvre dans son intégralité, mais ce n’est pas forcément très grave dans l’absolu, et il est possible de commencer à lire après sans que la découverte du reste soit gâchée. C’est une réelle force d’écriture ici, de pouvoir prendre l’histoire en cours de route et que tout soit limpide assez rapidement.

The First Slam Dunk est un film passionnant, à l’animation impressionnante, qui saura vous tenir en haleine, que vous soyez initiés ou néophytes du manga et du basket. Takehiko Inoue y revient près de 20 ans plus tard, en venant creuser le passé d’un de ses personnages, et en résulte un film particulièrement percutant, qui s’inscrit comme une parfaite adaptation mais aussi un émouvant complément du manga original.

The First Slam Dunk, de Takehiko Inoue, 2h04, avec Shugo Nakamura, Subaru Kimura et Kenya Miyake – Sorti le 26 juillet 2023 au cinéma

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