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[CRITIQUE] The End & Vincent doit Mourir (L’Etrange Festival 2023 – Jour 11)

Il y a toujours des journées plus faibles que d’autres, et pour cet avant-dernier article sur l’Etrange Festival, j’ai eu le plaisir de passer ma journée devant deux films pas dingues du tout.

En préambule, quelques mots sur le nouveau film de Jonathan Glazer, The Zone of Interest, qui était diffusé aujourd’hui. Je l’avais découvert à Cannes, mais je ne l’ai pas revu durant l’Etrange Festival. Je dirais juste que 10 ans après son dernier long, le cinéaste fait un film aussi intrigant que maîtrisé. Son utilisation du hors-champ et le décalage qu’il crée entre l’horreur des camps et la vie quotidienne de cette famille est assez grandiose. Effrayant ou bien comique, le film provoque en tout cas un profond malaise, tant ce qu’il filme semble banal. Un grand film d’horreur pour certains, un grand film comique pour moi. Si nous devons encore attendre 10 ans pour que Glazer nous réalise un nouveau film de cette trempe (et pas un insipide Under the Skin), c’est avec plaisir que j’attendrai.

THE END (FRAGMENTS ARTIFICIELS DE L’ESPÈCE HUMAINE)

Le premier film de cette journée est sans le moindre doute la séance durant laquelle j’ai pris le moins de plaisir. The End (et des trucs entre parenthèses), réalisé par les frères Olivier et Aurélien Héraud, est une proposition assez étonnante. On va suivre plusieurs personnages, dans leurs tribulations qui sont liées entre elles, ou pas, on ne sait pas. Proposition étonnante, c’est le moins que l’on puisse dire, puisque ces messieurs proposent un film où il n’y a pas de cinéma. Il y a certes une caméra, il y a certes des acteurs, mais c’est bien la seule chose qui se rapproche du septième art. The End, je cite les mots des réalisateurs, n’a pas un scénario linéaire, mais circulaire. Oublions le fait que je ne sache pas ce que cela veut dire, le film a pour premier problème, de ne pas avoir de scénario. L’incohérence règne tout du long, face à ces saynètes, parfois liées, parfois non, rendant ce film, non pas absurde, mais d’un total non-sens.

© Banana Productions

S’il part comme une comédie absurde, The End se transforme rapidement en un plagiat du cinéma de David Lynch auquel on retire toute sa substance et tout son intérêt. Je sais, beaucoup retiennent du cinéma de Lynch sa bizarrerie. Mais si son cinéma marche, c’est qu’il crée une ambiance, et qu’il se sert de tous les outils du cinéma, pour mettre en scène ses idées étranges. Ainsi, si vous filmez une voiture comme dans la première scène de Mulholland Drive ou que vous faites les mêmes scènes que Lost Highway, mais que vous n’y mettez ni d’ambiance, ni de contexte, cela vous donne simplement des scènes poussives et ridicules, n’ayant pas le moindre intérêt puisque le matériau de base est en tout point supérieur. Je me retiendrai d’en dire plus, le film n’en vaut pas la peine. Je suppose qu’on justifiera le bordel scénaristique en disant que c’est un hommage à Inland Empire, personnellement, je dirai juste que le film est une belle représentation du néant cinématographique, et qu’il est un poil (voir plus) prétentieux.

The End (et des trucs entre parenthèses) de Aurélien Héraud et Olivier Héraud, 1h42 – Date de sortie inconnue.

VINCENT DOIT MOURIR

Deuxième film et encore un premier film français qui nous plonge dans le genre. Vincent doit Mourir, réalisé par Stéphane Castang, passé par la Semaine de la Critique de Cannes cette année, raconte l’histoire de Vincent qui se fait taper par des gens. Pourquoi ? Il n’en sait rien. Un long voyage va donc débuter pour lui, ponctué de violence et d’amour. J’en attendais beaucoup de ce film et de son synopsis très intrigant, mais après l’avoir vu, je suis assez déçu. Ma déception ne viendra que d’une chose : le fait que le scénario est profondément con. Alors oui, je peux faire abstraction de certaines incohérences devant les films que je vois, mais quand tout le déroulé de ton histoire ne repose que sur une écriture ridicule, c’est dur de ne pas en parler.

© Capricci Films

Pourtant Vincent doit Mourir est formellement très honorable. Avec un Karim Leklou en grande forme et une Vimala Pons toujours aussi brillante dans tous ses rôles, le film reprend certains codes du film de zombie pour donner de jolies scènes et de bons moments de tension. Mais, comme je le disais, le film me laisse sur le carreau du fait de son non-sens. Car si un événement pareil se produisait aujourd’hui, il serait totalement inimaginable et idiot de penser que cela pourrait se dérouler comme ce qui est montré dans le film. Aucune situation n’est crédible, aucune réaction n’est possible, à moins que chacun des 8 milliards d’humains sur Terre soit profondément demeuré (ce qui est statistiquement compliqué). Encore une fois, cela me fait de la peine de voir ce film, plein de belles intentions, autant gâché par sa connerie. Certes, il est un peu long et plusieurs scènes mériteraient d’être raccourcies, mais nous sommes face à un premier film qui a une réelle envie de développer un survival sanguin et nerveux, chose qui manque au cinéma français.

Alors, malgré mes réticences, j’espère que d’autres projets comme Vincent doit Mourir verront le jour, qu’elles corrigeront ses défauts et seront de belles œuvres. En revanche, à aucun moment je n’encourage et ne sauve quoi que ce soit dans The End, grande tâche de ce festival.

Vincent doit mourir de Stephan Castang, 1h47, avec Karim Leklou, Vimala Pons, François Chattot – 15 novembre 2023

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