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[CRITIQUE] His House – Ne pas fuir son passé, vivre avec

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Par Louan Nivesse

Depuis l’impact majeur de Get Out de Jordan Peele, de nombreux réalisateurs ont embrassé la cause défendue par ce dernier, véhiculant un message de tolérance et de contestation sociale. Peele a initié, voire popularisé, un mouvement cinématographique horrifique à connotation sociale, convoité par le public, les jeunes cinéastes et même les producteurs, y voyant une opportunité commerciale ou un effet de mode. Ainsi, là où nous étions autrefois confiants, aujourd’hui, nous adoptons une posture plus prudente à l’égard des nouveaux films de ce genre qui débarquent sur nos écrans, notamment après la déception qu’a suscitée le maladroit Antebellum. Dans ce contexte, que vaut donc His House ? Un nouveau film d’horreur à visée antiraciste qui se positionne dans la lignée du cinéma de Peele ainsi que de celui de Del Toro.

Rial (Wunmi Mosaku) et Bol (Sope Dirisu) sont des réfugiés sud-soudanais, fuyant la guerre civile. Durant leur périlleux voyage en mer, ils ont perdu leur fille dans une tempête. Bien qu’ils aient trouvé refuge à Londres, leur droit de résidence se limite à une modeste maisonnette en piteux état…

Malgré la présence manifeste d’un discours antiraciste dans son écriture, His House, du tout jeune Remi Weekes, aborde avant tout la difficile intégration d’un couple de réfugiés noirs dans un pays étranger, entouré d’une population pétrie de préjugés et de jugements. La pression constante de la société environnante se matérialise à travers le logement qui leur est attribué. Une demeure vaste où ils doivent trouver leurs marques, se sociabiliser, mais surtout se conformer aux normes pour obtenir leur liberté au sein de l’Angleterre. Or, cette propriété se révèle rapidement étrange : des bruits énigmatiques émanant des murs, des jeux de lumière évanescents, des ombres mouvantes, jusqu’à l’apparition de créatures monstrueuses ou fantomatiques.

Entre les esprits masqués, métaphore de la population soudanaise, les zombies symbolisant l’angoisse face à une société nouvelle et inconnue, ou encore la créature terrifiante représentant la peur d’être rejeté en raison de son origine ou de sa culture, Weekes parvient subtilement à mettre en images un scénario engagé, en utilisant les codes de l’horreur sans chercher à les révolutionner.

Dans cet huis clos oppressant, Weekes s’autorise quelques escapades dans les rues et quartiers labyrinthiques, où le couple, désorienté, se retrouve confronté à des rencontres aussi hostiles qu’amicales, sans parvenir à apaiser leurs angoisses. Entre la maison suffocante et l’extérieur déroutant, le couple ne trouve pour seul repère que lui-même.

Un premier film est rarement parfait, et cela est tout à fait normal. Celui-ci tire parti de ses imperfections pour délivrer un message sincère et explorer un éventail visuel qui témoigne des compétences variées de Weekes en tant que cinéaste. Ainsi, le réalisateur utilise par moments des séquences de rêverie onirique pour s’échapper de l’enfermement, entre souvenirs douloureux et cauchemars terrifiants. On retiendra notamment l’image du repas solitaire de Philippe, coincé dans une pièce aux murs brisés flottant sur l’eau, symbole de liberté, avant d’être entouré de zombies.

Parmi les aspects marquants de ce long-métrage, mentionnons la musique et la présence de Javier Botet au casting. La bande originale, mêlant sonorités africaines traditionnelles et thèmes horrifiques classiques, apporte une fraîcheur bienvenue à l’atmosphère du film, plongeant le spectateur dans un univers sonore hors du commun qui renforce le sentiment d’étrangeté. Quant à l’acteur, célèbre pour ses rôles d’effrayantes créatures dans des films tels que [REC] ou Conjuring, sa présence permet à Weekes de combiner effets spéciaux modernes et techniques plus traditionnelles, donnant vie à une créature tangible et palpable.

His House est effrayant, tant dans sa forme que dans son fond. Pendant moins d’une heure et demie, nous sommes immergés dans la terreur des personnages, sans recourir aux artifices habituels du genre. Bien que le film perde un peu de son souffle lorsqu’il intègre d’importants flashbacks dans son climax, il parvient intelligemment à rebondir pour conclure de manière satisfaisante cette histoire terrifiante.

His House de Remi Weekes, 1h33, avec Wunmi Mosaku, Sope Dirisu, Matt Smith – 30 octobre 2020 sur Netflix

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