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[CRITIQUE] Connectés – Un apéro qui sonne faux

Il était inévitable que cela se produise, et voici donc le premier d’une série (probablement longue) de films sur le confinement : Connectés, réalisé par Romuald Boulanger, était, dès son annonce, une œuvre redoutée et redoutable. En débarquant directement sur Prime Vidéo, que vaut cette comédie/thriller française ? En plein confinement, un samedi soir, un groupe de très bons amis se réunit en ligne pour partager un apéritif virtuel. Soudain, l’un d’entre eux est agressé et séquestré en direct par un inconnu, sous les yeux impuissants de ses amis, qui assistent à la scène derrière leurs écrans. Ils vont bientôt découvrir que cet inconnu mystérieux connaît parfaitement tous leurs pires secrets et compte les révéler au grand jour, les uns après les autres.

L’écriture est tout simplement aberrante. On le savait déjà, mais c’est même pire que ce à quoi on pouvait s’attendre. Écrit par le réalisateur lui-même, le film semble errer sans but, incapable de définir sa direction narrative. Pendant près d’une heure et demie, on subit des dialogues d’exposition épuisants, sur fond de drame français cliché. Entre adultères et trahisons entre amis, les révélations s’enchaînent sans préparation préalable, et les personnages se résument à une action, un adjectif, sans susciter le moindre intérêt. Quant à l’enquête menée par ce pseudo psychopathe, dès son apparition masquée (avec une voix modifiée ?), on devine aisément son identité, l’acteur ayant un phrasé si reconnaissable que même sans sa voix, on le reconnaîtrait. De plus, le mélange de comédie au milieu de ces disputes incessantes sonne faux, le film semblant se moquer de lui-même sans aucune direction claire.

Si le film visait à reproduire un véritable apéritif gênant entre quadragénaires essayant de se comporter comme des jeunes, c’est une réussite. Aucun des acteurs ne parvient à s’en sortir dans ce scénario bancal, surjouant sans conviction, rendant les relations entre les personnages totalement invraisemblables. C’est profondément embarrassant, au point de rendre le visionnage désagréablement oppressant. Le cas le plus flagrant est celui de Claudia Tagbo, qui semble totalement dépassée. On a l’impression que les acteurs se fichent éperdument de ce film écrit à la va-vite, tourné dans la précipitation après une nuit bien arrosée. Leur détachement est évident, et on finit par éprouver de la compassion à mesure que Connectés approche de sa conclusion.

En choisissant de tout filmer en capture d’écran, à la manière des précurseurs Unfriended ou Searching, Connectés semble emprunter un chemin qu’il n’a pas compris. Tout d’abord, le réalisateur ne parvient pas à nous situer dans l’espace virtuel suivi à l’écran. Nous manquons de contexte et de repères, notamment lorsque des bureaux d’ordinateur fictifs sont créés, différents de ceux de Windows ou d’Apple. Nous sommes loin de notre univers quotidien, et les fenêtres s’ouvrent sans explication, diffusant des musiques extra-diégétiques alors que Spotify existe. De plus, la technique n’est jamais exploitée pour nous livrer des révélations intéressantes à travers l’utilisation des fenêtres internet ou d’autres éléments similaires. Toutes les révélations, absurdes et dénuées de sens, émergent exclusivement à travers les pensées des personnages, dans des dialogues écrits sans cohérence ni logique.

Dans l’ensemble, le film est dépourvu de sens, sans ambition pour captiver le spectateur. Même si l’on tente de se moquer de ce projet, cela devient difficile, tant l’ennui et l’embarras nous envahissent. Prime Vidéo semble devenir, après Forte et Brutus vs César, le cimetière des films français, et ce n’est peut-être pas une mauvaise chose. À éviter, à bon entendeur.

Connectés de Romuald Boulanger, 1h25, avec Nadia Farès, François-Xavier Demaison, Stéphane De Groodt – Sur Prime Vidéo le 11 novembre 2020

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