Il y a des films inoubliables qui ont pu lancer la carrière d’un cinéaste, à la fois atypiques et cinématographiquement parlant, brillants sur la forme. Puis, d’autres le sont pour une tout autre raison, leur médiocrité achevant la filmographie d’un réalisateur. BigBug appartient non seulement à la deuxième catégorie, mais constitue également un des pires films Netflix sortis depuis longtemps. L’histoire ? Celle de résidents d’une maison, enfermés par leurs robots d’intérieur pour cause de protection, puisqu’il semble que les androïdes extérieurs tentent de se révolter contre la population. Le scénario du film pourrait s’arrêter ici, si seulement cela était le cas.
On connaît pourtant bien le style de Jean-Pierre Jeunet, jouant de son humour excessif et de ses courtes focales, pour créer le malaise et pourquoi pas susciter un brin de poésie. Qu’il s’agisse de la Cité des enfants perdus ou Delicatessen, le ridicule des antagonistes était correctement contrebalancé par l’autodérision des héros, tout aussi marginaux. Dans BigBug, au-delà de l’esthétique surannée des décors de studio, il n’y a pas de juste milieu. Les blagues ne fonctionnent jamais, et les acteurs ne peuvent malheureusement s’en sortir. Les enjeux se limitant au sexe et à la climatisation d’intérieur, ce n’est pas le charisme inexistant des robots qui puisse apporter une quelconque crédibilité à l’ensemble.
Pas de repos pour les robots !
Globalement, la menace du film pourrait se résumer à un gigantesque robot incarné par François Levantal, qui s’incruste l’espace d’une quarantaine de minutes dans la demeure, menaçant de les tuer à coup de rayon laser. Mais oui on l’aura compris, le bug est général et la fin du monde est proche, bien sûr ! Kitsch au possible, le film dispose d’une galerie de personnages trop large, et pas suffisamment développée. Il ne faut pas espérer des performances à la hauteur, entre Isabelle Nanty et Stéphane De Groot, l’ensemble est perdu au sein des dialogues les plus risibles de toute la carrière de Jeunet. Cela est pourtant dommage, la distribution était assez intéressante sur le papier. Un huis-clos infernal, qui ne cesse d’être bruyant et abrutissant pour ne rien raconter d’intéressant, voilà ce qu’est ce long-métrage. Cette description est sévère, et l’on n’aurait jamais pu espérer une telle catastrophe de la part de Jeunet, mais il est impossible de cautionner une telle caricature, à vomir.
La grande magouille (et sinon, le pauvre François Levantal)
L’émission introduisant le film, Homo Ridikulus n’était pas une si bête idée finalement, les robots prenant le contrôle sur les humains devenus bêtes sauvages, si seulement le réalisateur l’approfondissait. Cela devient rapidement gênant à mesure que les caméos (Dupontel et Pinon) s’enchaînent, sans compter la séquence où le Yonix (Levantal) commence à fouetter la jeune résidente. Pourquoi cette émission est-elle animée par ces robots ? Qu’en tirent-ils ? La réponse ne sera jamais donnée, l’ensemble restant cantonnée à de l’humour de mauvais goût permanent. La réalisation n’est pas non plus catastrophique, mais elle est au service du néant scénaristique, il n’y a rien de particulièrement intéressant qui y est raconté. Si le script n’était pas écrit par des enfants en maternelle, Jeunet aurait encore pu sauver son film de la purge cinématographique, mais ce n’est pas le cas. La fin du film est tout à fait représentative de la fainéantise de l’entreprise, les robots étant eux-mêmes responsables de leur annihilation, se choisissant comme cibles. Si cela est vraiment le BigBug donnant le titre au long-métrage, Jean-Pierre Jeunet serait donc fier de sa facilité scénaristique en guise de conclusion.
Sans inspiration quelconque, BigBug est un échec cuisant difficilement pardonnable. L’écriture est médiocre, et la direction artistique ridiculement grossière, un comble pour Jeunet à qui on connaît habituellement son perfectionnisme en la matière (même sur ses « petits films »). Pour le bien de tous, revoyez Delicatessen et fuyez-le.
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Note : 0.5 sur 5.BigBug sur Netflix le 11 février.