Becoming Father espère manifester le pouvoir du balancier suspendu au-dessus de la tête d’une personne, qui oscille et cherche un point d’équilibre. Ce pendule, c’est la moralité : Au cœur de l’adaptation du réalisateur Tetsuya Mariko, il y a un viol, mais de cet acte découle une tentative de nuancer un effet réactionnaire enraciné dans les regards patriarcaux. Dans Becoming Father, Miyamoto (Sosuke Ikematsu) s’enivre d’une série de manifestations toxiques fétichisées après que sa partenaire, Yasuko (une Yū Aoi tout à fait déterminée), ait été violée. Le viol lui-même devient un acte que Miyamoto prend comme une attaque personnelle, une émasculation qui ne peut être corrigée que par une physicalité performée et exaltée.
Ce qui revient à dire que le cœur de ce film est en fait l’ego d’un homme. Mariko renforce cette impression par la manière dont il esthétise les scènes de violence de Miyamoto, nous laissant avec un film dont le « regard » formel est essentiellement en accord avec la perspective patriarcale qu’il semble vouloir critiquer. Nous le voyons également dans la scène du viol : Mariko passe constamment d’un Miyamoto assombri à une Yasuko immobilisée, comme si leurs expériences justifiaient une représentation parallèle. La capacité d’action de Miyamoto est déjà établie ici, car son incapacité à défendre Yasuko devient un événement traumatisant tout aussi important (sinon plus) que le viol de Yasuko.
Aussi problématique que soit cette configuration, je pense que cela vaut la peine de réfléchir à l’absence de dégoût que j’ai ressentie en regardant la vengeance de Miyamoto à l’écran, lorsque, à un moment donné, un prédateur est castré, j’ai effectivement ressenti une charge de satisfaction à l’égard de cet acte. Il devient également clair que Mariko veut exploiter cette émotion, en particulier celle engendrée par la masculinité toxique. Cela se traduit notamment par la futilité totale de la violence de Miyamoto, qui sert de reconnaissance tacite de l’immoralité de la forme de droit qu’il exerce à travers ses actes.
Miyamoto laisse finalement son couple central à un point de résolution acceptable pour leur relation, ce qui rappelle un sentiment exprimé au début du film : « l’équilibre entre le bonheur et le malheur est remarquable ». Mariko tente clairement de trouver cet équilibre, de balancer le pendule dans la bonne direction au bon moment, en ruminant les implications d’un traumatisme objectivé et réapproprié, tout en suggérant qu’une certaine forme de « romantisme » peut être atteinte en suivant un chemin désordonné vers la rédemption.
Mais ce film ne parvient jamais à réconcilier la contradiction de ces deux positions jumelles et, de ce fait, il ne parvient jamais à pénétrer de manière convaincante dans son propre traumatisme.
⭐⭐⭐⭐
Note : 3.5 sur 5.Becoming Father au cinéma le 27 juillet 2022