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[CRITIQUE] 8 Rue de l’Humanité – Fenêtre sur CourVID

Malheureusement, il est difficile de penser que les films sur les confinements COVID soient une bonne idée. D’accord, The Morning Show l’effleure légèrement dans sa deuxième saison, mais l’histoire elle-même est toujours au diapason de la précédente saison. 8 Rue de l’Humanité de Dany Boon suit les résidents excentriques d’un immeuble à Paris pendant le confinement et montre comment ils ont dû s’adapter à la vie. Le problème est qu’il s’agissait de la réalité pour la plupart des gens dans le monde. Il ne s’agit pas d’une présentation pertinente de l’inconnu.

Mais en mettant de côté mes griefs à l’égard de la réalisation opportuniste, 8 Rue de l’Humanité tente de faire une histoire loufoque, sincère et émotionnelle qui entremêle la comédie dans l’écriture. Vous avez le mari Supercondriaque avec sa femme Laurence Arné (c’est un adjectif de jeu, oui), les béguins d’enfance, le concierge inquiet dont la femme est hospitalisée, et les deux influenceurs sur Instagram qui font de leur mieux pour vivre l’un avec l’autre tout en gardant leur contenu et leurs relations en vie. Le film est conçu pour faire comprendre au public à quel point ce nouveau mode de vie est devenu irritant. De la part d’un réalisateur qui a quitté son pays pour vivre dans un quartier « immunisé » à la COVID, Los Angeles. Un grand plaisir donc, de nous faire juger par un Dany Boon hypocrite et irrespectueux de son public, des Français, nous.

Mauvais réalisateur qui ne fait pas ex-spray.

Mais 8 Rue de l’Humanité verse également dans l’absurde. Au cœur de l’histoire se trouve un scientifique (joué par le triste Yvan Attal) qui tente désespérément de trouver un remède au virus tout en essayant de tenir les habitants au courant. Cet angle farfelu ne sert pas à grand-chose, si ce n’est à faire ressortir la réalité de la situation. Le film aurait bénéficié du réalisme tout en conservant les tropes de la comédie. Au lieu de cela, il tente de jouer la comédie en se concentrant sur l’événement mondial qui a le plus changé la vie des gens ces derniers temps, mais cela ne fonctionne pas. La majorité des vannes, des bêtises, des absurdités sont tirées de faits réels. Aucune recherche donc. Ça ne devrait pas vous surprendre, étant donné que son auteur a toujours fait ses films sur des facilitées, des resucées. Elles se remarquent même dans le casting effroyable. Entre un François Damiens dans la caricature de lui-même, une Alison Wheeler neurasthénique contrainte de chanter la célèbre chanson « pain de mie » pour faire rire les deux vieux du fond, et toutes les autres têtes inconnues qui ne font que s’enliser dans une caractérisation stéréotypique, étiquetée.

Toute la grandeur de 8 Rue de l’Humanité est qu’il est tellement éloigné de la réalité et de son public qu’il est (presque) entièrement capté en studio. Les bâtiments paraissent factices, l’éclairage trop superficiel, le film n’existe jamais. Là où l’étude de personnages durant l’ère COVID aurait pu être intéressante avec un bon metteur en scène à la barre, qui a des idées, un axe sur lequel se concentrer, Dany Boon préfère livrer une soupe minute commandée par une plateforme qui voulait s’offrir le réalisateur français le plus « bankable » auprès du grand public. On peut remercier Dany Boon de nous faire une comédie moraliste sur le COVID avec un message super-maladroit de « soutien » envers les médecins, cependant, on peut en outre le remercier pour sa contribution pour soutenir le cinéma français, celui qui l’a tant enrichi durant des années, celui que le réalisateur a abandonné (en plus d’avoir réduit son image).

En voyant la fin du film, excuse toi pour ça Dany.

La plus grande insulte de son auteur est de confronter ses spectateurs au néant. Un vide étendu dans plus de 120 minutes atrocement longues où l’inexistante mise en scène révèle l’oisiveté des dialogues et de l’écriture. Un long interminable-métrage qui ne va pas réhabiliter un cinéma national qui ne demande que ça, surtout en ce moment. Espérons que son passage sur Netflix passe inaperçu, s’oublie promptement, s’enterre.

Difficile d’étendre l’avis au-delà du mépris. 8 rue de l’Humanité n’a aucune vie, aucun goût et ne cesse de nous plonger dans une asphyxie nocive. Sur son trône, Boon se moque de nous, les spectateurs, la plèbe, alors que l’unique idiot du confinement, c’est lui. La nouvelle exclusivité Netflix agasse plus qu’elle ne déprime, déjà car elle reflète une époque où nous subissons toujours des conséquences, puis car le grand public n’a pas besoin de pass sanitaire pour découvrir ce chaos d’idées conservatrices plus vexantes que comiques. Faudrait demander à Yvan Attal de trouver un vaccin contre ce virus qu’est 8 rue de l’Humanité. Ah oui ! Les Choses humaines..

Note : 0.5 sur 5.

8 Rue de l’Humanité disponible sur Netflix le 20 octobre 2021.