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[CRITIQUE] El buen patrón – Le surprenant petit jeu pour être un bon patron

Le grand esprit d’observation dont fait preuve le scénariste et réalisateur espagnol Fernando León de Aranoa (plus connu pour la sympathique comédie dramatique sur la classe ouvrière, Les Lundis au soleil, en 2002) s’exprime pleinement dans El buen patrón, une comédie intemporelle et mordante dont Javier Bardem est le pivot. Ce film, caricature amusante des prétendues valeurs de l’entreprise et de leur comportement politiquement incorrect, marque la troisième collaboration entre l’acteur et le réalisateur. Leur dernière œuvre commune remonte à 2017, un biopic médiocre sur le narcotrafiquant colombien Pablo Escobar intitulé Escobar.

Contrairement à ce dernier, le scénario de celui-ci est bien mené, offrant un portrait sombre mais drôle de Julio Blanco (Bardem), l’héritier manipulateur et propriétaire d’une entreprise de fabrication industrielle. Ce charmeur à la langue bien pendue semble rechercher la perfection et l’équilibre dans tout ce qu’il fait. Mais, au fond, il est complètement aliéné par son ambition matérialiste, c’est un opportuniste sournois qui use et abuse de ses employés quand cela l’arrange. Alors qu’il attend la visite d’un comité local qui pourrait lui décerner un prix prestigieux et financièrement avantageux, il doit faire face à une série de problèmes : un employé d’âge moyen récemment licencié (Óscar de la Fuente) a décidé de camper devant l’usine et de protester avec véhémence contre une mesure injuste, un directeur de production de longue date et ami d’enfance (Manolo Solo) n’est plus digne de confiance au travail depuis que sa femme le trompe, et une jeune stagiaire irrésistible (Almudena Amor) veut davantage d’attention de la part du patron. Tous ces personnages et bien d’autres encore ont un temps d’écran suffisant, ce qui récompense le public lorsqu’ils sont inévitablement confrontés à Julio d’une manière ou d’une autre.

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Et c’est là que réside la véritable réussite de ce film : il n’est pas seulement agréable, mais il atteint son objectif final et offre une belle récompense. Cela est dû en grande partie au remarquable Bardem, qui sait exactement quel type de personnage il joue, et comprend quelles parties de lui montrer et quelles parties cacher. C’est un personnage manipulateur, bien sûr, mais il peut aussi se soucier des gens et veut sincèrement faire ce qui est juste, tant que cela lui profite à long terme. Il est parfait de l’extérieur, mais intérieurement, il a besoin de cette reconnaissance et, en réalité, il ne veut pas avoir affaire à ses employés. On ne peut jamais savoir s’il a le contrôle ou s’il l’a complètement perdu. La manière dont Bardem incarne Julio laisse un goût amer dans la bouche des spectateurs, qui ne savent pas si ses actions sont de l’ingérence, de l’intervention ou si elles guident doucement la balance. L’intrigue étant axée sur les personnages et conçue de manière à faire monter la tension, El buen patrón souffre malheureusement d’un problème de rythme et d’équilibre. Dans l’idéal, on voudrait qu’un film comme celui-ci se construise lentement jusqu’à ce que l’on n’en puisse plus, mais on a souvent l’impression d’un rythme monotone, incapable de faire correspondre la tension de la structure à celle de la narration. Il ne reste que des scènes qui s’éternisent un peu trop, et ce qu’il fallait pour amener ce film à un autre niveau, c’était un scénario et une durée plus serrés.

Le plaisir de El buen patrón est alimenté par le charisme de Bardem, les répliques intelligentes et drôles, et la fluidité de l’histoire. Nous sommes en présence d’un cinéma ludique dans ce qu’il a de plus léger, qui combine un commentaire social incisif et des rires féroces et cocasses.

Note : 3 sur 5.

El buen patrón au cinéma le 22 juin 2022.

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