La réplique cinglante du procureur Anthony Petrocelli, “Il regarde une partie de moi“, résonne dans la salle d’audience, empreinte de racisme et de cynisme. Pourtant, même lui semble surpris par la crédibilité de ses propres paroles. Face à lui, l’avocate de la défense Katherine O’Brien arbore un scepticisme palpable. Elle demande cinq à sept ans pour son client, un jeune Noir accusé de complicité de meurtre dans un vol à main armée. Steve, joué par Kelvin Harrison Jr., déborde de potentiel, mais O’Brien et Petrocelli savent tous deux que son sort est scellé. C’est un jeu de chiffres, où la couleur de sa peau présume de sa culpabilité. C’est là l’essence même du film Le Monstre. Peu importent les preuves ou la réputation de l’accusé, tout ce que les jurés verront, c’est un monstre.
Ce thème, au cœur du film d’Anthony Mandler, adapté du bestseller pour jeunes adultes de Walter Dean Myers, explore les préjugés raciaux dans le système judiciaire. Steve est accusé d’avoir participé à un vol qui a mal tourné, mais il vient d’une famille respectée et fréquente la meilleure école de la région. Ses parents, incarnés par Jeffrey Wright et Jennifer Hudson, sont des modèles de réussite et d’amour. Pourtant, la couleur de sa peau le condamne d’avance aux yeux du système. Le film, écrit par Janece Shaffer et Colen Wiley, diffère sensiblement du livre original. Il intègre un dispositif narratif récurrent dans les médias contemporains, où Steve filme son quotidien dans l’espoir de créer un documentaire. Cependant, cette approche n’atteint pas le niveau de commentaire social attendu. De plus, les montages musicaux et l’expérience visuelle de Mandler semblent parfois superflus.
Pourtant, malgré ses défauts, Le Monstre offre des performances saisissantes, notamment celle de Kelvin Harrison Jr. dans le rôle principal. Son interprétation nuancée donne vie à un personnage complexe et émouvant. Le film, bien que parfois maladroit, aborde avec succès les nuances de la race et de la justice. Mandler souligne la complexité des questions juridiques, montrant qu’elles ne peuvent être réduites à des jugements simplistes. Et dans ce paysage d’incertitude morale, Kelvin Harrison Jr. brille comme une étoile montante, confirmant son statut de talent prometteur dans l’industrie cinématographique.
Le Monstre d’Anthony Mandler, 1h38, avec Kelvin Harrison Jr., John David Washington, Jennifer Ehle – Disponible sur Netflix
Un commentaire
“Il regarde une partie de moi”…”Ses propos sont empreints de racisme et de cynisme” ? Le lien logique entre ces deux bouts de phrase ne semble pas très clair.
Bon, sinon le propos du film est surtout ultra convenu, ultra politiquement correct et donc très peu représentatif de la réalité sociétale américaine. Ce qui est grave, c’est que la plupart des gens modelent leur vision du monde sur ce qu’ils voient et entendent à la TV et au cinéma. Or la vision transmise par Hollywood n’a souvent rien à voir avec la réalité. Hollywood (voire plus largement le showbiz) a toujours fait et continue de faire de la propagande. Et donc la vision de la sociéte américaine, ou de n’importe quelle autre société, influencee par Hollywood est totalement biaisée et erronée : ces biais cognitifs transmis par la culture populaire, la TV, la radio etc ont ensuite les plus graves conséquences sur la société et le monde. Et c’est vrai en ce qui concerne ce sujet comme n’importe quel autre.