Le légendaire MonsterVerse a réintroduit avec majesté les titans emblématiques Godzilla et King Kong, façonnant en seulement trois œuvres une métamorphose qui, à contrecœur, érige ces solitaires en héros de l’humanité. Au gré de deux de ces toiles cinématographiques, Godzilla a tracé sa voie, affrontant une cohorte d’adversaires, s’érigeant, aidé de Mothra et d’alliés humains, en souverain des monstres. Quant à Kong, son introduction plus solitaire a marqué l’adolescence d’une espèce sur le déclin, assoiffée de connexion tout en défendant farouchement Skull Island contre l’oubli. L’allusion à leur destinée commune ne transparaissait que dans d’ancestrales fresques, dévoilées lors du générique final de Godzilla : Roi des Monstres. Godzilla vs. Kong s’attèle à narrer ce croisement, mêlant un spectacle visuel époustouflant et une propension au tumulte monstrueux qui harmonise cet univers.
Avant que ces deux colosses ne s’affrontent, Godzilla vs. Kong prend le temps de tisser l’écheveau des protagonistes de chaque camp. Pour Kong, ses protecteurs Dr. Ilene Andrews (Rebecca Hall) et la jeune Jia (Kaylee Hottle), orpheline dotée d’une relation singulière avec le gigantesque primate. Du côté de Godzilla, Madison Russell (Millie Bobby Brown) émerge comme l’une des rares défenseures restantes de ce titan dans un monde où l’image du sauveur qu’il incarnait s’est estompée. S’alliant à son acolyte Josh Valentine (Julian Dennison) et au conspirationniste Bernie (Brian Tyree Henry), elle exhume un complot ourdi contre le suprême monstre, ourdi par le PDG d’Apex, Walter (Demian Bichir). Les fils de cette intrigue se croisent inéluctablement, dévoilant le duel pour la suprématie des titans.
Le scénario d’Eric Pearson (Thor : Ragnarok) et du scénariste du MonsterVerse, Max Borenstein, sème de multiples graines, sans prendre le temps de souffler. Les vastes territoires explorés manquent de profondeur, offrant peu d’éclaircissements quant à la raison sous-jacente du combat titanesque, suggérant simplement l’instinct primal entre prédateurs. Kong, célébré depuis longtemps comme l’un des monstres les plus empathiques du cinéma, est magnifié à travers une narration émouvante, cherchant à conquérir l’allégeance du public envers ce géant au grand cœur, en quête d’un foyer. Son développement est complet, émouvant par sa musicalité. En revanche, Godzilla, désintéressé de l’humanité, est relégué à un second plan alors que son récit humain vire vers une trame comique et une quête de cambriolage, détournant l’attention de l’essence du récit. L’accent est mis sur le chaos des Kaiju, l’action prenant le pas sur le développement des personnages ou une intrigue de plus en plus complexe. Pourtant, ces derniers monopolisent la majorité de l’écran. Heureusement, le réalisateur Adam Wingard s’immerge pleinement dans l’action et l’aventure. Couplé à une technologie sophistiquée, Godzilla vs Kong propose un spectacle monstrueux et captivant. Le moment central surgit tardivement, mais Wingard en tire une énergie palpitante, une destruction purement divertissante. Le cinéaste tient sa promesse, gratifiant un titan de la victoire, bien que le dénouement puisse paraître prévisible aux observateurs attentifs.
Ce crossover grandiose emballe autant qu’il le peut en environ deux heures, passant de narrations denses mais simples à l’action trépidante typique des blockbusters Kaiju. Les événements se bousculent tellement que le temps semble presque insuffisant pour tout contenir. Le casting est solide, mais aucun des acteurs ne surpasse le matériel qui leur est offert. Néanmoins, Wingard sait exactement quel type de film il façonne et ce que recherche le public. Le rythme effréné propulse l’ensemble, et les visuels en font indubitablement la pièce maîtresse visuelle du MonsterVerse. C’est déroutant et parfois déraisonnable, mais cela répond aux attentes. Avec son lot de frissons et un spectacle visuel impeccable, pourquoi se préoccuper du pourquoi du combat entre le lézard et le singe ? Nous, spectateurs, en sortons les véritables vainqueurs… ou non. La notion de « débrancher son cerveau pour savourer le film » peut sembler futile mais s’avère étonnamment adaptée ici. Si l’introspection est votre inclination, mieux vaut passer votre chemin.
Godzilla vs Kong d’Adam Wingard, sorti en 2021.